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Happy end indépendant
avec John Cassavetes, Seymour Cassel, Gena Rowlands, Val Avery
MK2 2007 /  24.99  € - 163.68 ffr.
Durée film 114 mn.
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma, Pays : Etats-Unis, 1972
Sortie DVD : Septembre 2007

Version : 2 DVD 9, Zone 2
Format vidéo : PAL, format 1.85
Format image : Couleurs, 16/9 compatible 4/3
Format audio : Anglais, Français mono et Dolby Digital 5.1
Sous-titres : Français


DVD 1 :
- Film Chapitré
- Préface par Luc Lagier (5 mn)
- "Amours vagabondes", un film de Luc Lagier (20 mn)
- Bande-annonce

DVD 2 :
- "John Cassavetes" (50mn)

L'auteur du compte rendu : Scénariste, cinéaste, Yannick Rolandeau est l’auteur de Le Cinéma de Woody Allen (Aléas) et collabore à la revue littéraire L'Atelier du roman (Flammarion-Boréal) où écrivent, entre autres, des personnalités comme Milan Kundera, Benoît Duteurtre et Arrabal.

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John Cassavetes incarne presque à lui tout seul le cinéma indépendant américain. Acteur et réalisateur d'origine grecque, il est né à New York le 9 décembre 1929. Il fait ses études à Colgate College puis à l'Academy of Dramatic Arts de New York. Jusqu'en 1960, il reste un acteur de second plan, travaillant pour la télévision dans la plupart des grandes séries américaines, comme Johny Staccato et Alfred Hitchcock présente. Enseignant parallèlement le théâtre, il attire l'attention sur lui avec Shadows, un film improvisé sur le thème du racisme. Deux ans plus tard, il tourne La Ballade des sans espoir puis Un enfant attend. John Cassavetes quitte alors le système hollywoodien pour réaliser des films indépendants avec sa femme, l'actrice Gena Rowlands, qu'il a épousée en 1953. On lui doit aussi Faces (1968), Une femme sous influence (1974), Meutrtre d'un bookmaker Chinois (1976) ou Opening night (1978). Parallèlement, le cinéaste est aussi un acteur connu qui a tourné avec Don Siegel dans Face au crime (1956) et A bout portant (1964), Martin Ritt dans L'Homme qui tua la peur (1957), Robert Aldrich dans Les Douze salopards (1967) et encore Roman Polanski dans Rosemary's baby (1968). John Cassavetes est mort le 3 février 1989 à Los Angeles.

Tourné entre Husbands (1970) et Une femme sous influence (1974), Minnie and Moskowitz (1972) constitue l'un des moins bons films de John Cassavetes. Minnie Moore (Gena Rowlands) et Seymour Moskowitz (Seymour Cassel) sont deux êtres que tout oppose, lui, gardien de parking au look beatnik, à la moustache nietzschéenne, elle, une femme élégante et raffinée travaillant dans un musée. Leur admiration inconditionnelle pour l’acteur Humphrey Bogart semble bien être leur seul point commun. C’est lorsque Moskowitz intervient dans la violente dispute entre Minnie et son amant que les deux âmes emplies de solitude se rencontrent. De cet instant, naît leur histoire d’amour tendre mais orageuse…

Minnie and Moskowitz semble être, au niveau dramatique, pas très éloigné de Tenessee Williams. Comme d'habitude chez John Cassavetes, la caméra (à l'épaule) est souvent en mouvement, jouant généralement dans les gros plans, essayant de capter le moindre tressaillement des acteurs. Elle tâtonne, cherche fébrilement les visages, les corps dans des plans séquences. Elle veut nous inclure dans les corps et leurs mouvements. Le montage incarne un mouvement, privilégiant le télescopage : le raccord part sur un mouvement esquissé de l'acteur, mais ensuite change brusquement d'axe. Panoramiques ultra rapides, séries de gros plans non raccords...

Il n'y a pour ainsi dire pas d'histoire et la fiction est totalement éclatée, sans direction précise, John Cassavetes voulant capter la vie ou des fragments de vie à l'état pur ou brut. Le résultat est souvent captivant mais assez limité dans l'ensemble, ne restant qu'à des émotions vives certes mais sans former un canevas, sinon cohérent, du moins signifiant. Le cinéma de John Cassavetes reste en effet incapable de comprendre les allers et retours, les contradictions des personnages, ne faisant qu'enregistrer (certes avec talent) le flux tendu de la vie. Cependant, on a là sans doute un projet plus alerte et moins cérébral que chez la Nouvelle vague française à la même époque.

Jouant sur le dérèglement, la fragmentation, l'aléatoire, le bouillonnement, le film s'éloigne nettement du standard hollywoodien comme on peut s'y attendre. Le projet était donc intéressant : montrer deux êtres forts distincts, carrément opposés dans leurs approches. Hélas, John Cassavetes a du mal à construire cette histoire d'amour avec un minimum de cohérence, se complaisant trop dans les oppositions binaires, fortes, ou encore dans les situations mélodramatiques excessives.

A l'évidence, le réalisateur a un faible pour les personnes à la marge, ou qui n'arrivent pas bien à se sortir du système. Solitaires, loosers, excessifs, emportés, marginaux, etc., parsèment toute son œuvre. Par un certain côté, cela force l'admiration et touche. John Cassavetes a cette compassion pour les gens de la rue. Le meilleur du film en définitive est quand le cinéaste capte au passage un marginal dans un bar (la scène du début avec Seymour Moskowitz et un solitaire), notations concrètes sur la vie quotidienne. D'un autre côté, cette façon où l'on pleure, l'on crie, l'on gueule, l'on se chamaille, l'on s'embrasse pour se réconcilier, l'on se quitte fâchés pour mieux se retrouver est lassante. A force de faire dans le décalage ou dans l'opposition outrancière, on ne construit plus grand chose. On s'enlise dans le pathos. On devient mécanique, et même, on risque de tomber dans le cliché par mégarde, le film se terminant par un happy end, un mariage avec beaucoup d'enfants... On peut voir cela comme une ironie malicieuse de la part de John Cassavetes mais pourquoi développer une telle fin plutôt qu'une autre plus élaborée ?

Point positif : le film échappe à toute politisation et le contexte des années 1970 aurait pu faire basculer Minnie and Moskowitz dans l'apologie béate et beatnik de l'amour, ce qu'il évite fort heureusement. Autre point positif, comme toujours chez John Cassavetes, les acteurs sont tous formidables. Nous ne sommes donc pas déçus, même si cela ne suffit pas à hisser le film parmi les meilleurs œuvres du cinéaste.


Yannick Rolandeau
( Mis en ligne le 28/09/2007 )
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