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Moi non plus
avec Alain Resnais, Claude Rich, Olga Georges-Picot
Editions Montparnasse 2008 /  20  € - 131 ffr.
Durée film 91 mn.
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma, Pays : France, 1968
Sortie DVD : 8 janvier 2008

Version : DVD 9, Zones 2
Format vidéo : PAL, format respecté 1.33
Format image : Couleurs, 4/3
Format audio : Français mono
Sous-titres : aucun


Bonus :

- Entretien avec Claude Rich : souvenirs du tournage – 15 min.
- Rencontre Resnais-Sternberg : analyse croisée du film et du scénario – 19 min.
- Propos d’Alain Resnais : entretien avec Alain Resnais à propos du film – 12 min.
- Livret prestige 32 pages : interviews et analyses du film

L'auteur du compte rendu : Scénariste, cinéaste, Yannick Rolandeau est l’auteur de Le Cinéma de Woody Allen (Aléas) et collabore à la revue littéraire L'Atelier du roman (Flammarion-Boréal) où écrivent, entre autres, des personnalités comme Milan Kundera, Benoît Duteurtre et Arrabal.

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Alain Resnais est un cinéaste respecté. Il est rarement critiqué dans un sens négatif. Et pourtant... Auteur de Nuit et brouillard (1955), Hiroshima mon amour (1959), L'Année dernière à Marienbad (1961) sur un scénario d'Alain Robbe Grillet, Providence (1974) ou encore de Mon oncle d'Amérique (1981), Mélo (1986) et plus récemment Smoking No Smoking (1993), On connaît la chanson (1997), Pas sur la bouche (2003) ou Cœurs (2006), le cinéaste a fait son chemin. Il y a parfois des étonnements critiques que l’on n’arrive pas à admettre, même au fil des années. Malgré le fait que le cinéaste veuille aborder les genres sérieux et légers, jouant à la fois dans la cour de Robbe-Grillet et de la bande dessinée (I want to go home), il faut bien oser le dire, le cinéma d'Alain Resnais est terriblement didactique.

Je t'aime, Je t'aime est réalisé en 1968 et c'est de surcroît un film de science-fiction, dont le scénario est de Jacques Sternberg, auteur lui-même de romans et de contes de science-fiction. Quelle en est l'histoire ? Dans une clinique, Claude Ridder (Claude Rich) se débat entre la vie et la mort à la suite d'une tentative de suicide. Dès sa sortie de clinique, on lui propose d'aller dans un centre de recherches afin de devenir le sujet d'une expérience que les savants s'apprêtent à réaliser dans le plus grand secret : un voyage dans le temps d'une durée d’une minute. Claude accepte. On le prépare médicalement puis il est enfermé dans une sphère. Claude se retrouve une année auparavant, à l'instant exact prévu par les savants, sur une plage de la Méditerranée avec sa femme Catrine (Olga Georges-Picot). C'est une période de bonheur : ils s'aiment et plaisantent ensemble. Pour mettre fin à l'expérience, Claude doit retourner quatre minutes dans la machine. Mais bien avant que ce temps ne soit écoulé, il replonge dans son passé. Les savants s'inquiètent. Le mécanisme ne fonctionne plus. Impossible de le faire revenir dans le présent. La mémoire de Claude lui fait revivre plusieurs fois de suite ce même épisode puis d'autres plus anciens ou plus proches. Catrine est morte asphyxiée. Mais est-ce un suicide, un meurtre, ou un accident ?

Tout cela ferait certainement un excellent film. Cependant, il ne suffit pas de prendre des sujets profonds pour être passionnant. La mémoire, le temps sont les thèmes de prédilection du cinéaste. Hélas, Alain Resnais est un peu le prototype du cinéaste «sérieux» et ennuyeux (d’autres sont sérieux et passionnants, comme Michelangelo Antonioni) car son traitement est très théâtral et cérébral. Procédé qui est, évidemment, fort peu cinématographique.

Un film par exemple comme Smoking No Smoking, en deux parties de 2 h 25 chacune, l'une pour montrer ce qui se passe dans une situation si un personnage fume et l'autre s'il ne fume pas, relève de l'exercice scolaire le plus étriqué qui soit. Ce n'est pas la longueur qui est en cause mais la mise en scène appliquée et redondante inutilement. Dans Je t'aime, Je t'aime, c’est le cas aussi : les personnages ne cessent non seulement de parler mais de se parler à eux-mêmes. Bref de commenter ce qu'ils pensent sentent quasiment sans arrêt. Dans une scène du film, le personnage joué par Claude Rich s'ennuie assis à son bureau de travail : il se met alors à commenter verbalement son ennui pendant deux bonnes minutes au moins ! Le moment est redoublé par un appel à l'horloge parlante pour bien nous montrer que le personnage est accablé par le temps qui passe et l'ennui ! Il faut préciser ce que ce n'est pas tant d'ailleurs le fait du comédien Claude Rich (plutôt bon en général) mais plutôt de l'interprétation trop sèche et trop distancée que le cinéaste lui impose tout du long. Cette approche indique bien qu'une solution cinématographique n'a pas été trouvée et qu'à la place, on lui substitue un processus verbal qui peut aller pour une scène ou deux mais certainement pas pour un film en entier.

Pour une oeuvre à la limite du fantastique, jouant de la science-fiction, et où donc il aurait fallu opter par une écriture imagée, le film d'Alain Resnais est plombé par une narration bavarde et explicative. On a bien du mal au final à croire à une telle histoire qui ne nous surprend pas. C'est hélas la marque de fabrique d'Alain Resnais que d'imposer ce côté cérébral et trop littéraire à ses scénarios, approche redoublée d'ailleurs par la collaboration de romanciers allant de Marguerite Duras à Robbe-Grillet, trop enfermés dans le "style" ou l'"écriture". Ce qui pouvait pourtant être différent avec Jacques Sternberg se transforme ici en film théâtral et verbeux.

Le film est aussi une succession de scènes, certaines courtes, d'autres plus longues sans que l'on comprenne vraiment l'intérêt d'une telle découpe. On se doute bien que le héros revit ses souvenirs en parcourant à nouveau les différentes strates de sa mémoire. Et alors ? Le film privilégie un montage singulier, entrechoquant les scènes, les faisant se répéter parfois même plusieurs fois. Mais les personnages ne sont nullement attachants, émouvants, ni même n'agacent ou provoquent l'irritation comme cela peut être le cas dans les films d'Eric Rohmer qui met en scène, à l'inverse, des personnages bien particuliers de la vie quotidienne avec leurs lubies et leurs névroses.

Alain Resnais réalise souvent soit des films légers et insignifiants (On connaît la chanson) ou trop abscons (L'Année dernière à Marienbad). À cela, l'utilisation de la musique religieuse de Krzysztof Penderecki, musicien contemporain qu'utilisa plus habilement Stanley Kubrick dans The Shining, donne au film un climat avant-gardiste et naïf trop à la mode à cette époque. Les suppléments et notamment des propos d’Alain Resnais ne nous éclairent pas plus sur la pertinence d’un tel film et d’une forme aussi littéraire qu'asséchée. Le spectateur reste donc sur sa faim.


Yannick Rolandeau
( Mis en ligne le 18/01/2008 )
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