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Shara
avec Naomi Kawase, Kohei Fukunaga, Yuka Hyodo, Katsuhisa Namase, Naomi Kawase
Aventi Distribution 2004 /  13.26  € - 86.85 ffr.
Durée film 101 mn.
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma : 2004, Japon
Titre original : Sharasojyu

Version : Dvd zone 2- pal
Format vidéo : 16/9 – 1.85
Format audio : Japonais Dolby Stéréo
Sous-titres : Français

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Deux enfants, les jumeaux Kei et Shun jouent tranquillement dans la cour. Soudain Kei se lève et part en courant, comme un défi à son frère, qui se lance à sa poursuite à travers les vieilles rues de Nara, l’ancienne capitale du Japon. Au détour d’une ruelle, hors-champ à peine quelques instants, Kei disparaît, sans laisser de traces. Shara commence. La caméra s’était attardée, pour les premières images, dans les pièces sombres de l’atelier de fabrication de l’encre de chine. Lentement elle était parvenue à la lumière du soleil qui perçait à travers de petites fenêtres, lentement elle avait glissé sur les reflets dans les baies vitrées. Livrant comme une incertitude, une incrédulité, une curiosité devant le réel, une inquiétude rassurée devant le mystère des choses. Lorsque Kei puis Shun s’échappent de la cour, la caméra les poursuit, tremblante, sur toute la course, inquiète, son rythme s’emballe, entraîné dans le sillage des deux enfants. Une urgence apparaît, et lance le film : ne pas perdre ces enfants, ne pas les laisser seuls. Le film démarre sur cette urgence mystérieuse, on ne sait pas pourquoi Kei s’est lancé dans cette course sans but - « Je ne sais pas » répond-t-il à son frère qui lui demande où il va -, on se sait pas pourquoi nous les suivons. On ne sait pas pourquoi et comment Kei disparaît, sans un cri, sans une trace, sans un signe.

Ellipse. Shun a maintenant 17 ans. On découvre la vie de la famille Aso, sous la lourde chaleur de la canicule estivale, on retrouve la mère – interprétée par Naomi Kawase au ventre arrondi, le père plongé dans l’organisation de la plus belle fête de Nara, Shun entre ses dessins et son amie Yu. Le frère disparu est comme une présence bienveillante et paralysante pour Shun, qui doit à présent s’en affranchir, apprivoiser sa tristesse et accueillir un monde extérieur qui vient frapper à la porte de sa bulle : Yu et son amour pudique, sa mère et l’enfant à venir, son père et sa fête de quartier, le policier qui vient pour l’identification du corps retrouvé. On voit l’adolescent lentement apprivoiser une nouvelle vie, réapprendre les autres. Le film se demande comment peut-on vivre après cette disparition inexpliquée, et montre ce qui nous attache au monde, ce qui fait le lien avec les autres. Tout le film et tous les personnages sont en mouvement vers une délivrance, une renaissance apaisée.

Comme un être qui veut se souvenir, comprendre, savoir, la caméra de Naomi Kawase reste à regarder les choses, longuement, mais jamais elle ne s’arrête, jamais ce regard ne devient fixe. C’est un œil en mouvement permanent qui prend le temps de regarder, un œil dont on sent la vie battre, comme si ce cadre instable et pourtant très sûr suivait les pulsations d’un cœur : les images de Shara nous livrent la relation entre ces personnages, cette histoire, et une instance absente à l’image mais présente de l’autre côté, derrière ou à côté du spectateur. Sous ces images douces, au rythme d’une respiration calme, un enjeu vital émerge, d’autant plus puissant que la mise en scène lui offre le temps et l’espace pour le laisser advenir. Finalement Shara offre sa douce lenteur fébrile au spectateur, qui doit l’accueillir sans résistance pour renaître, peut-être lui aussi, à son propre monde.

Shara est une œuvre totale, qui explore notre rapport au monde pour en extraire l’essentiel, une énigme. En voix-off, des voisins avaient glissé, à la disparition de Kei : « Les Dieux l’auraient-ils enlevé ? », « Comment ça ? »

Pour le DVD en lui-même, on regrette l’absence de compléments : si Shara n’est pas un film qui se prête à l’exercice traditionnel du commentaire décortiqué, Naomi Kawase est une artiste suffisamment inconnue et rare pour attiser la curiosité. On pouvait donc attendre sur ce même DVD la présentation de ses autres travaux, comme cinéaste expérimentale et documentariste ou l’un de ses moyens métrages, par exemple.
Le support permet cependant d’affiner l’accueil de ses images et du son très précis qui les accompagne, de revoir, isolées ou en boucle, chacune des scènes, et ainsi creuser l’énigme de leur beauté, laisser apparaître de nouvelles intuitions. Une relation intime peut alors se tisser entre le film et celui qui le regarde. Shara a donc sa place dans la vidéothèque de celui qui scrute la planète cinéma à la recherche de vrais créateurs.


Florence Keller
( Mis en ligne le 30/11/2004 )
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