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Blu-ray Disc |
Une ''société romantique et pourrie'' avec Jean Renoir, Nora Gregor, Marcel Dalio, Paulette Dubost, Carette Editions Montparnasse 2011 / 19,95 € - 130.67 ffr. Durée film 105 mn. Classification : Tous publics | Sortie Cinéma, Pays : France, 1939
Sortie BD : 6 septembre 2011
Version : 1 BD-50, Zone B
Format vidéo : PAL, Format 1.33, 4/3
Format image : N&B, 16/9 natif
Format audio : Français Dolby Digital 5.1 et 2.0
Sous-titres : Français
Bonus :
- Documentaire : Il était une fois
''La règle du jeu''
- Jean Renoir présente «La règle du jeu»
- Entretien avec Claude Chabrol, Noémie Lvovsky et Eduardo Serra à propos du film
- Olivier Curchod présente «La règle du jeu»
- «La règle du jeu» dans la série ''Image par image''
- Bande annonce originale
- Jean Renoir, le patron : la règle du jeu et lexception Imprimer
En 1939, à laéroport du Bourget, André Jurieu, après un long vol, atterrit. Une foule enthousiaste assaille laviateur qui vient daccomplir la traversée de lAtlantique en 23 heures. Son ami Octave laccueille, mais la femme pour laquelle il a réalisé cet exploit, Christine, lépouse de Robert de La Chesnaye, un grand aristocrate, est absente. Interrogé par une journaliste, Jurieu ne réussit quà exprimer son dépit. Les reproches quil adresse à Christine, retransmis en direct à la radio, révèlent à la bonne société parisienne la relation équivoque qui le lie à Christine. Malgré cet impair, Octave, un intime des La Chesnaye, promet à son ami dintercéder en sa faveur. Il persuade Christine, mais également Robert de La Chesnaye, dinviter Jurieu à une partie de chasse en Sologne, dans leur château de La Colinière. Lors de ce court séjour, plusieurs intrigues amoureuses vont se nouer entre les différents invités, mais également entre domestiques, se dénouer, et finalement sachever dans le drame.
En concevant La Règle du jeu, Renoir ambitionne de réaliser un film densemble, représentant un groupe de personnes, une société : «je voulais dépeindre toute une société, presque toute une classe». Cette classe sera celle de la grande bourgeoise et de laristocratie française, une «société romantique et pourrie» selon lexpression de Renoir. Mais pour porter cette «grande idée», il lui faut trouver une intrigue quil déniche finalement dans la littérature classique. Pour écrire son scénario, il sinspire en prenant de grandes libertés des Caprices de Marianne dAlfred de Musset. La Règle du jeu peindra donc une société, une société entièrement absorbée par de petites intrigues amoureuses et sacrifiant aux rituels de classe. Renoir rompt avec la tonalité naturaliste de ses précédents films et affiche son désir de tourner un film léger. Pourtant la situation internationale ne se prête guère à la gaîté et la légèreté. Les accords de Munich viennent dêtre signés et la guerre gronde. Mais le cinéaste, en sinscrivant dans la tradition classique, celle représentée par des auteurs tels que Molière et Marivaux, Beaumarchais et Musset, sait que rien nest plus efficace quune comédie pour exercer une critique acerbe de la société. «Ne pas parler de la situation et raconter une histoire légère», nest-ce pas la meilleure illustration possible de «lesprit de Munich» ?
Jean Renoir sattache donc à montrer les travers impardonnables, en ces temps de catastrophe imminente, dune classe dirigeante, insouciante et oisive, plus occupée à jouir de ses privilèges et de ses biens que dinfluer sur la marche du monde et de fléchir le cours de lHistoire. A cette fin, il dévoile la règle du jeu qui régit leur mascarade sociale : tout ou presque est permis pourvu que les apparences soient sauves ; et son corollaire indissociable : le mensonge. Et gare à celui qui la transgresse
! Trop de sincérité, dinnocence tue ! La Règle du jeu est un «drame gai».
Une société pourrie, sans doute. Mais une société composée - et cest là toute la beauté de ce grand film - dindividus tous plus attachant les uns que les autres. Renoir est un humaniste, dont la raison le pousse à exécrer ce clan dirresponsables mais dont le cur, immense, étreint chacun des êtres qui le constitue. Du plus noble au plus misérable, il reconnaît à ses personnages cette part dhumanité qui fait de chacun deux son égal, qui fait deux, tout simplement, des êtres humains. Le marquis Robert de La Chesnaye est à ce titre un magnifique exemple. Cet homme oisif dont lunique occupation en dehors du temps quil consacre à sa femme et sa maîtresse consiste à collectionner et restaurer des automates du XVIIIe siècle, cet homme futile au comportement enfantin, en quelques plans, Jean Renoir nous le fait aimer. Son oisiveté se mue en grandeur, sa générosité, sa magnanimité, son humanité percent sous le masque du grand aristocrate.
Sans des comédiens dexception, en tête desquels on peut placer Marcel Dalio, le marquis de La Chesnaye, mais également Renoir lui-même, dans le rôle dOctave, les personnages de La Règle du jeu nauraient pu atteindre ce degré dhumanité. Mais sans le talent de «chef dorchestre» de Renoir qui lui permis de diriger avec intelligence les acteurs tout en leur laissant la liberté dimproviser 50% des scènes du film seraient improvisées , ces personnages nauraient pu exister.
Talent de «chef dorchestre» qui sexprime également dans la mise en scène, précise et échevelée. «A la vue du film, chaque spectateur éprouve limpression dassister au tournage ; on croit voir Renoir organiser tout cela en même temps que la projection ; pour peu on se dirait : Tiens ! Je vais revenir demain pour voir si les choses se passent de la même façon !». Truffaut, en écrivant, ces lignes ne pouvait rendre plus bel hommage à Renoir, metteur en scène. Complexe et inventive, la mise en scène na de cesse de créer du mouvement. Jean Renoir efface les frontières du champ et du hors champ en usant régulièrement de panoramiques qui suivent les comédiens dans leurs mouvements. Il utilise également un très grande profondeur de champ des optiques spécialement conçues à cet effet furent fabriqués pour le tournage pour capter plusieurs foyers daction dans un même plan. Le tout concourt à donner une impression de grand désordre, un grand désordre qui égale celui de la vie. En outre, Jean Renoir singénie à mélanger les genres. Le passage du vaudeville au boulevard, du boulevard au burlesque, du burlesque à la comédie de murs, de la comédie de murs au drame, etc., contribue à perdre un peu plus le spectateur dans les méandres tumultueux de La Règle du jeu.
Pour finir, il est bon de rappeler que les enjeux de La Règle du jeu ne se laissent pas appréhender facilement. Labsence de personnage principal, une intrigue qui semble relever de lanecdote, une mise en scène complexe, peuvent désorienter plus dun spectateur. Mais comme le précise Pierre Guislain, auteur de La Règle du jeu (Pierre Guislain, La Règle du jeu, éditions Hatier, collection ''Image par image''), un petit livre instructif, «La Règle du jeu est un film moins mis en scène que composé, composé comme une symphonie ou un tableau. [
] Pas question de se raccrocher à des structures dramatiques effectivement quasi inexistantes. Lhistoire na ici aucune importance. Tout ce que dit et montre le film, il le fait presque malgré lintrigue, dans ses vides, dans ses marges, plus que jamais «à côté» delle». Cest dans «ses vides, ses marges" que le spectateur pourra découvrir toute la beauté de ce chef-duvre.
Et cette édition Blu-Ray pour mettre à l'honneur ce "must" du cinéma français. Image restaurée, bonus foisonnants : un petit bijou pour cinéphiles ! Les compléments proposés par les Éditions Montparnasse devraient réjouir le spectateur avide den savoir un peu plus sur ce chef-duvre du cinéma. Olivier Curchod dans sa présentation de La Règle du jeu retrace lhistoire tourmentée du film. De la première inspiration de Renoir jusquà la ressortie du film en 1959, en passant par les péripéties du tournage, aucun détail nest oublié. Olivier Curchod commente également dans son intégralité le film. Il sattache à cerner la place et le rôle de chacun des personnages dans la conduite de la dramaturgie. Le documentaire image par image, plus didactique et donc un peu ennuyeux, tente danalyser la mise en scène et lesthétique du film. Enfin, le plus savoureux reste les deux documents où Jean Renoir apparaît en personne. Le premier des ces films est une présentation pleine dhumour de La Règle du jeu ; le second, un entretien accordé à Jacques Rivette et André S. Labarthe pour la série Cinéastes de notre temps.
Stéphane Gauchon ( Mis en ligne le 16/09/2011 ) Imprimer | |
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