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Qui suis-je ? en version japonaise médiévale
Joël  Jung   Kwaïdan tome 1 - L'esprit du lac
Delcourt - Terres de légendes 2001 /  1.84 € -  12.06 ffr. / 48 pages
ISBN : 2-84055-466-6
FORMAT : 22 X 31
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Dans le Japon médiéval, la mort peut donner la vie éternelle et les légendes imprègnent le quotidien. Celle de l’esprit du lac trouve sa source dans une querelle amoureuse entre deux soeurs : Akane, laide et jalouse, défigure Orin, divinement belle. Celle-ci s’enfonce alors dans les eaux du lac pour oublier sa désespérance. A son retour de guerre, Nanko, le samouraï qu’elles se disputent se crève les yeux et se noie pour retrouver son aimée. Il ne reste à Akane que le ressentiment et l’éternité pour le ressasser. La mort d’Orin et de Nanko en effet a donné aux eaux du lac le pouvoir de prolonger la vie.

Régulièrement, Akane s’en recouvre le visage et, grâce à sa soeur sacrifiée dont elle a jadis volé le visage, elle peut régner sur son domaine à la tête d’une armée de Kwaïdan. Ces fantômes lui obéissent fidèlement et ont pour devoir d’empêcher Orin de sortir du lac. Car la princesse déchue pourra renaître si elle trouve un enfant prêt à accueillir son âme.

Deux cent ans prisonnière, une nuit pour s’échapper des eaux prisons : Orin un soir parvient à courir vers le village et à pénétrer le ventre rond d’une femme enceinte. Elle est rattrapée pourtant par un gardien d’Akane qui massacre la mère et ramène Orin vers le lac maudit. La petite fille, pourtant, sera sauvée grâce à son père, un pêcheur qui l’élève seul.

C’est l’histoire de cette fille masquée comme une princesse maudite que nous raconte Jung. Le lecteur suit sa quête vers ses origines, ses errances entre le sordide de son quotidien au bordel et le fantastique dont elle est porteuse malgré elle. La rencontre d’un peintre aveugle la guide sur ce tortueux chemin.

Chaque planche est un délice chez Jung. Le surnaturel qui baigne son scénario fait parfaitement écho à des couleurs qui éblouissent l’oeil du lecteur, des corps, des caractères dessinés avec émotion. Tout l’album est centré sur la symbolique du visage. Lieu d’expression des émotions et de la personnalité, sa perte est une perte d’identité. Chercher à arracher le masque doré de l’héroïne, c’est se lancer avec elle dans une étonnante quête de soi. Sublimée par un fantastique oriental qui nous désoriente et nous enchante aussi, cette fable métaphysique renouvelle avec talent les tentatives de réponse à l’éternelle question : "d’où venons-nous" ?


Thomas Bronnec
( Mis en ligne le 15/03/2001 )
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