annonce rencontre site de rencontre rencontre femme rencontre blog
L'actualité du livre et du DVD Vendredi 22 octobre 2004
LE LIVRE
LE DVD
 
  ARCHIVES  /  PLAN DU SITE
LE LIVRE
Notre équipe
Littérature
Essais & documents
Philosophie
Histoire & sciences sociales
Agrégation d'Histoire 2005
Biographie
Science Politique
Sociologie / Economie
Historiographie
Témoignages Historiques
Géopolitique
Antiquité & préhistoire
Moyen-Age
Période Moderne
Période Contemporaine
Temps Présent
Histoire Générale
Poches
Dossiers thématiques
Entretiens
Portraits
Revues
Bibliographies
Beaux arts / Beaux livres
Bande dessinée
Jeunesse
Art de vivre
Poches
Sciences, écologie & Médecine
Rayon gay & lesbien
Histoire & sciences sociales  ->  Sociologie / Economie  
 

Du bon usage de l'auctorialité scientifique
Béatrice  Fraenkel   David  Pontille   La Signature scientifique
CNRS éditions - CNRS Sociologie 2004 /  2.9 € -  19 ffr. / 198 pages
ISBN : Une sociologie pragmatique de l'
FORMAT : 17x24 cm

L'auteur du compte rendu : Ingénieur Agronome diplômé de l'Ecole Nationale Supérieure Agronomique de Rennes, Frédéric Suffert est chercheur à l'Institut National de la Recherche Agronomique depuis 2000. Spécialiste en épidémiologie végétale et protection des cultures contre les maladies telluriques, il prépare actuellement une thèse de doctorat en formation continue.
Imprimer

Cet ouvrage est le fruit de plusieurs années de travail dans la vie d'un doctorant, David Pontille, désormais sociologue, chercheur au Centre d'Etude et de Recherche Travail, Organisation, Pouvoir, dans une unité mixte (Université Toulouse le Mirail - CNRS). Le livre est issu d'une thèse soutenue en 2000. Comme le fait remarquer Béatrice Fraenkel dans sa préface, l'ouvrage affirme dès son titre l'existence d'un phénomène complexe, celui de la signature scientifique. Pour nous convaincre, elle cite un exemple qui ne peut laisser indifférent : une publication dans le domaine de la physique devenue célèbre pour ses 555 cosignataires...

La question centrale du livre peut dès lors se résumer à «Qu'est ce qu'un auteur scientifique ?» et surtout «Qu'est ce qui justifie d'être auteur en plus d'être celui qui a 'écrit' ?» Lorsque l'on aborde ce livre avec curiosité, une question vient immédiatement en tête : David Pontille, qui va sans aucun doute analyser la question de la signature scientifique avec la rigueur qui caractérise toute thèse de bonne facture, remettra-t-il en question sa propre auctorialité ? De qui est cet ouvrage ? Qui y a participé ? Un peu comme si un enquêteur criminel, faute de mieux, finirait par se trouver lui-même suspect mettant ainsi à l'épreuve sa conscience professionnelle. L'auteur se pose effectivement cette question en préambule. Une mise en abîme, ultime, qui pose dès le début pourtant, le sérieux de l'étude et la question phare… Qui est l'auteur ?

Cet ouvrage est le fruit d'un excellent travail de recherche en sociologie, essentiellement tourné vers la pratique de l'acte scientifique. En suivant les chercheurs de trois disciplines, au quotidien et dans leur propre vision critique des pratiques de la profession, leur remise en question, et leurs introspections discrètes, David Pontille étudie avec minutie les négociations, tensions, et justifications dont la signature des publications scientifiques fait l'objet. Les différences entre sociologie, droit et biologie sont indéniables, mais l'image que véhiculent les chercheurs de ces trois disciplines et la réalité commune des attributions de leurs valorisations écrites présentent de nombreux points communs. La science apparaît bien souvent comme issue d'esprits géniaux, indépendants, isolés tant dans l'adversité que la réussite. Cette représentation laisse cependant dans l'ombre le travail collectif, le projet d'équipe, cellule de base de l'entreprise de production et de valorisation des connaissances scientifiques.

La publication en tant qu'activité de création et de valorisation scientifique a fait l'objet de nombreuses recherches. La plupart d'entre-elles se concentrent sur deux aspects : la productivité (des chercheurs, des équipes, des laboratoires...) ou les modalités de persuasion déployées dans les textes. Elle est appréhendée par David Pontille du point de vue des pratiques de signature. Questionnées à différents niveaux, les modalités d'inscription de la signature scientifique s'avèrent plurielles. Elles révèlent les nombreux enjeux de cette sphère d'activité, tels que l'élaboration et la communication de connaissances à différents publics ou l'évaluation spécifique des chercheurs.

L'articulation d'investigations méthodologiques variées permet en effet de mettre en relief les multiples dimensions qui lient les textes à leurs contextes historique, disciplinaire, et national. Fondée sur des études de cas contemporains, l'analyse met au jour un double processus. Le premier concerne le cadrage différentiel des pratiques de signature en science selon leurs espaces d'inscription (graphiques, disciplinaires, institutionnels et organisationnels). Ce cadrage concerne aussi bien les éléments cognitifs du travail que ses aspects institutionnels. Un exemple, dans lequel beaucoup de collègues lecteurs se reconnaîtraient, peut être le cas de la division d'un travail s'organisant sous la responsabilité d'un professeur, qui prend en charge la majorité des opérations de recherche. Son nom est alors placé en premier. Des chercheurs, qui apportent une aide technique, une partie de l'écriture et une relecture critique, sont tout de même signataires : ils se placent à la suite. Mais l'agencement des noms n'exprime pas leur contribution respective. La division du travail étant rendue possible par l'investigation empirique quantitative, les opérations de recherche qui concernent la collecte des données et/ou leur interprétation donnent accès à la signature. L'agencement des noms sur les publications garde ainsi les traces d'une double hiérarchisation : celle des opérations de recherche spécifique à chaque espace disciplinaire, et celle du statut des personnes.

Le second processus est relatif aux pratiques quotidiennes des scientifiques. «Les cadres institutionnels et cognitifs sont en effet le produit de contextes socio-historiques particuliers : ils sont susceptibles d'être redéfinis par les pratiques qui, en les perpétuant, les modifient. L'analyse permet ainsi de dégager des résultats tant sur la formalisation progressive des publications et des pratiques de signature que sur l'organisation de la production scientifique selon les disciplines. Mais parce qu'elle est attentive aux variations des formes d'appropriation en fonction des espaces où celle-ci se déploie, l'analyse débouche également sur une problématisation de la notion d'auteur dans cette sphère d'activité particulière. L'auctorialité, malgré la multiplicité de ses facettes, est matérialisée - encore et toujours - sous la forme d'une série de nom de personnes signataires, et présentée comme une des principales formes possibles de clôture, une des seules logiques d'attribution des énoncés.

On pourra reprocher le décalage qui existe parfois entre le biologiste dont la pratique est ici comparée avec celle du sociologue, mais également entre le biologiste, et le sociologue David Pontille, auteur de l’ouvrage : il est difficile de rentrer réellement dans la pratique d’une autre discipline, en l'occurrence la biologie, avec le regard d'un autre champ disciplinaire, lui-même analysé dans ses habitudes. C'est bien l'unique petite critique à formuler, tant ce livre est intéressant, bien que réservé à des spécialistes. Au travers de quelque intrigue de labo citée en exemple, décrite avec rigueur et impartialité, on se prête volontiers au jeu de l'auctorialité, si bien définie et analysée par ailleurs par l'auteur : reconnaître telle ou telle pratique de la signature, réelle, vécue, rapportée ou critiquée par de proches collègues ou par soi-même.


Frédéric Suffert
( Mis en ligne le 05/10/2004 )
Imprimer
 
 
SOMMAIRE  /   ARCHIVES  /  PLAN DU SITE  /  NOUS ÉCRIRE  /  
 
  Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2004  
rencontre coquinesvpmonsite.com rencontre femme chat rencontre rencontre homme