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Littératureet Romans & Nouvelles  

Un parfum de cèdre
de Ann-Marie MacDonald , Lori Saint-Martin et Paul Gagné
Flammarion 2000 /  21.37 €- 139.97  ffr. / 600 pages
ISBN : 2-08-067748-9

Morbide dévotion

Entre ses trois filles nées en Nouvelle-Ecosse, James Piper voue un amour absolu à son aînée Kathleen. Un don précoce pour la musique prédispose la jeune fille à une glorieuse carrière de cantatrice. Fière de son talent, la rousse hautaine débarque à New York, en 1918, pour parfaire son enseignement.

Dans cette ville en pleine ébullition, Kathleen se lasse vite des répétitions de chant monotones et court les boîtes de jazz du quartier de Haarlem. Intriguée par l'attitude méprisante de Rose, son accompagnatrice au piano, l'élève rebelle l'entraîne dans ses vagabondages nocturnes. De retour au pays, Kathleen meurt tragiquement à la naissance de ses jumeaux. Seule rescapée de cette nuit épouvantable, Lily grandit dans l'absence de son frère disparu. Les deux dernières filles de James élèvent de leur mieux la petite infirme désormais orpheline. Les rares moments de bonheur les attirent au grenier, auprès d'un vieux coffre de cèdre chargé de souvenirs inavouables.

Chacun des membres maudits de la famille Piper se souvient-il du petit corps enfoui sous une pierre, au milieu du jardin ? Unique vestige des mensonges effacés, le journal intime de Kathleen apprend à Lily l'abominable secret de ses origines. Le titre capiteux du roman, Un parfum de cèdre, n'annonce en rien une bluette nostalgique, mais dissimule au contraire une cascade de morts violentes et de crimes sordides. Le malheur s'acharne avec fureur sur ces exilés déjà éprouvés par de rigoureuses conditions économiques. Le comportement mystérieux du chef de famille suscite un climat de crainte insupportable.

Quelle menace trouble Materia au point de supplier Dieu d'exécuter son mari à la guerre ? Le retour de James, indemne, marque le commencement des catastrophes. Les jeux pervers des enfants reproduisent à l'identique des scènes de cauchemar bien trop véridiques. Le fil alambiqué des souvenirs se tord en circonvolutions complexes, à l'image d'un arbre généalogique resté incomplet.

Si la saga des Piper cause une pénible impression de trouble complaisance, le cahier secret de Kathleen apporte une bienheureuse exaltation dans cette atmosphère viciée. L'ardeur contagieuse de la belle provinciale, avide de s'ouvrir aux tentations new-yorkaises attire immédiatement la sympathie. La jeune fille succombe non pas aux pièges de la grande ville mais à un passé familial tortueux. Malgré de fortes scènes dramatiques, le outre-Atlantique d'un livre aussi éprouvant laisse résolument songeur.

Christine Gallardo
( Mis en ligne le 21/02/2001 )
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