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Littératureet Romans & Nouvelles  

L'Artiste des dames
de Eduardo Mendoza
Seuil 2002 /  19.5 €- 127.73  ffr. / 304 pages
ISBN : 2-02-050040-X

Traduit de l’espagnol par François Maspero

Barcelone la truculente

Voici le héros du Labyrinthe aux olives de retour, dans une situation pour le moins déconcertante. Pour le congédier de l'institut qui l'hébergeait dans l'attente d'une improbable guérison, le directeur, en guise de préavis, n'y est pas allé par quatre chemins : "Si un journaliste vous interroge sur les opérations de réhabilitation du terrain, dites-lui (…) qu’à votre avis, à partir du moment où les patients ont tous guéri le même jour et évacué les lieux, il n’y a aucune raison pour que la SA Immobilière Sugranes ne construise pas un centre commercial et six immeubles d’habitation à l’endroit où se trouvait un asile de fous. Tu m’as compris, canaille ?" Le voilà jeté sur les routes de Catalogne sans autre relation qu’une sœur tapinant à Barcelone.

Installé comme coiffeur dans la truculente "ville des prodiges" qu’est Barcelone (dont l’essor économique altère tout de même le picaresque : la cité n’est plus celle des premiers romans de Mendoza), le narrateur coule des jours inutiles mais tranquilles. Mais il ignore qu'en réalité, pour lui, les ennuis ont déjà commencé… Embarqué dans une affaire de meurtre qu’il n’a pas commis mais que la mal nommée providence semble s’acharner à lui faire endosser, l’Artiste à la recherche de la preuve de son innocence, écume des milieux barcelonais pour le moins troubles.

L’Artiste des dames est un thriller étonnant et détonant, dans lequel le burlesque des dialogues et des descriptions le dispute à la férocité de la satire morale et sociale. En prennent largement pour leur grade "la très excellente et très illustre municipalité, la très glorieuse et deux fois fameuse assemblée provinciale, les très intègres et dévoués organismes de santé et de bien-être social" – entre autres. On s’amuse beaucoup, mais il ne faut pas s’y arrêter car Mendoza plonge sa plume dans l’acide citrique. Et à la dernière page, on applaudit bien fort L’Artiste pour ces bons moments. Preuve également que l’humour dit anglais se pratique aussi sous des latitudes méditerranéennes.

Vianney Delourme
( Mis en ligne le 11/03/2002 )
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