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Littératureet Romans & Nouvelles  

Le Porteur de cartable
de Akli Tadjer
JC Lattès 2002 /  18 €- 117.9  ffr. / 256 pages
ISBN : 2-7096-2246-7

Français d'Algérie, Algérien de France...

Omar mène une double vie. A dix ans, il est un petit écolier parisien sans histoires, mais aussi sans amis. Simplement parce qu’il est algérien, et que nous sommes au début de l’année 1962. Tous les vendredis après l’école, il va pointer les membres du réseau Turbigo, avant que le collecteur de fonds ne vienne récupérer leurs petites enveloppes de "participation" à la révolution : Omar est, comme son père, un militant FLN. Et le chef du groupe, toujours très élégant dans ses costumes d’alpaga et sa grosse voiture, lui a promis qu’il deviendrait l’un de ses ministres quand lui-même serait au pouvoir. La vie d’Omar s’écoule, ordinaire, sans argent, bercée par la perspective prochaine de connaître le pays dont son père lui parle tant. Jusqu’au jour où des réfugiés pieds-noirs s’installent dans l’appartement en face de chez lui. Ce logement spacieux tant convoité par la famille d’Omar qui se serre dans un deux-pièces. Raphaël, le nouveau petit voisin, a dix ans. Expansif, en quête d’affection, il cherche la compagnie d’Omar-le-discret à qui l’on a appris que les pieds-noirs étaient les voleurs de sa terre. L’amitié ne sera donc pas si facile à nouer. A moins que l’Algérie de Raphaël ne soit pas exactement celle d’Omar. A moins que, mis à l’écart par la classe, les deux enfants ne se retrouvent sur ce qui les sépare. Et puis la mère de Raphaël tombe malade de vivre à Paris, quand la famille d’Omar y trouve toutes ses racines. A quelle terre appartiennent ces deux enfants, l'Algérien qui n’a jamais vu l’Algérie et qui se sent si parisien, le Français qui de la France n’a jamais connu qu’Alger ?

Akli Tadjer pose un regard réciproque sur la déchirure algérienne, déplaçant dans le monde de l’enfance le grand traumatisme de la guerre d’Algérie. Dépecée de ses attributs adultes, politiques et territoriaux, celle-ci est vécue à travers le désarroi et le quotidien de deux enfants pétris de préjugés qui développent à travers leurs propres expériences un regard personnel sur la rupture entre deux peuples. Loin d’être donneur de leçons, le Porteur de cartable est un livre tendre, attachant, pudique et drôle, qui ne cède pas au pathos. Et suggère à ses lecteurs une réflexion moins partisane, un peu plus humaine et sentimentale sur des événements vécus par ceux qui n’ont fait que subir les enjeux de l’indépendance.

Karine Papillaud
( Mis en ligne le 09/04/2002 )
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