L'actualité du livre
Littératureet Policier & suspense  

La Mort d'Adonis
de Catherine Rosset
Nicolas Philippe - Pôle noir 2002 /  17.50 €- 114.63  ffr. / 254 pages
ISBN : 274880015X

Meurtre au sérail

Un espace clos, un cadavre, des suspects, un inspecteur de police et son acolyte : tous les ingrédients sont réunis pour un parfait roman policier. Et pourtant, c’est bien plus qu’un simple exercice de style que nous propose Catherine Rosset. Baignée de la lumière des tableaux de Poussin, l’intrigue s’enroule et se déroule à l'image de la maîtrise de ce peintre classique.

Le proviseur d'un grand lycée parisien du Cours de Vincennes est retrouvé poignardé dans son bureau. Les suspects sont nombreux, en raison notamment de son passé sulfureux de coureur de jupons… L’inspecteur Viera, tenace et esthète, épaulé par la patiente et subtile Sylvie, fouille le passé de Gérard Boux ainsi que son entourage. Le long des couloirs du lycée, de la salle des professeurs aux appartements privés en passant par les caves inondées, c’est tout un univers qui gravite autour du proviseur, et une galerie de portraits touchants ou cocasses, parfois stéréotypés (l'informaticien repoussant ou la secrétaire aguichante) qui défile. Dans cet imbroglio où les susceptibilités du milieu professoral ont leur importance, l’inspecteur patine.

Car au-delà du crime passionnel, le meurtre de Gérard Boux lève le voile sur une famille éclatée, sur le poids des convenances et du qu’en dira-t-on, l'occasion pour Viera comme pour Sylvie de revenir sur leur propre vie privée, également chaotique.

La solution, c’est dans les tableaux de Poussin et particulièrement La mort d’Adonis que Viera la trouvera, éclairé par la mystérieuse Dame en bleu. En introduisant une dimension esthétique par l'association de scènes-clés à certains tableaux du grand maître, l’auteur réussit le difficile pari d'injecter de la poésie et de la sensualité dans la noirceur et la brutalité du monde criminel.

Catherine Rosset affirme dans cet ouvrage son style soigné, fluide et délié, tel un coup de pinceau, travaillant chaque phrase comme un coin de tableau. Une sensualité qui n'échappe pas à la figure emblématique de l'inspecteur Viera. A la manière d'un Nestor Burma ou autre Pepe Carvalho, ce doux solitaire use de son charme pour attirer à lui les confidences, envoûtant son interlocuteur autant que son lecteur. Et c'est avec un désir non déguisé que l'on attendrait un retour du tandem Sylvie-Viera dans les rues de Paris.

Maud Jobbé-Duval
( Mis en ligne le 04/07/2002 )
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