L'actualité du livre
Littératureet Policier & suspense  

La Baba-Yaga
de Elisa Vix
Odin 2005 /  17,85 €- 116.92  ffr. / 220 pages
ISBN : 2-913167-49-7
FORMAT : 14 x 21 cm

Le Baba au Yaga

Pour concocter un bon polar, vous avez besoin, comme base, d’une équipe policière au complet : un inspecteur (le lieutenant Thierry Sauvage de la PJ de Soissons, séduisant quadragénaire à la ramasse, aux méthodes d’enquête un brin décalées), un médecin légiste (Philippe Seignol, tempérament pointilleux mais doué d’une sensibilité inattendue) et une collaboratrice zélée (une femme-cheval, pleine d’enthousiasme et de vie, artistement dénommée Joana Sénéchal). Le morceau principal ? Un crime odieux (le meurtre de Tania Verneuil, beauté russe achevée à la chevrotine) rehaussé d’ingrédients juteux (un mari poète, un amant fougueux, un inquiétant obstétricien, des secrétaires troubles, des notables baignant dans un sordide climat de mensonge). Ajoutez un zeste de problèmes de société (le trafic d’enfants, les agences matrimoniales qui offrent à de belles filles vénales de quitter leur Est natal dans la perspective de se retrouver dans les bras de vieux libidineux, etc.). Saupoudrez l’œuvre des vicissitudes personnelles des différents protagonistes (épouse volage, chien malade, compagne indépendante ou encore paternité non assumée) et de petits rebondissements. Vous obtiendrez un suspense… qui retombe en soufflé mal cuit !

Il est possible qu’Élisa Vix, dans La Baba-Yaga, son premier opus, pèche par excès d’application. Le mélange détonant de vocables trahit la forgerie ; la trame tellement bien ficelée en devient quasi «téléphonée» ; les personnages à la psychologie fignolée à l’excès sombrent dans le stéréotype là où l’auteur voudrait les rendre «humains». Et surtout, quelques scènes frisent le ridicule, par exemple celle où l’on assiste à un remake frelaté de Clarice Starling devant Hannibal Lecter, du genre : «Dites-moi pourquoi les hôpitaux psychiatriques vous terrorisent et je vous répondrais [sic !]. […] C’est du donnant-donnant».

On nous annonçait «La nouvelle reine du polar français» ; cette accrocheuse promotion finalement déçoit. Ce n’est pas tellement l’intrigue, sympathique et tenant relativement la route, qui dérange ici. Non, ce qui nous empêche de nous laisser porter par l’histoire et de l’aborder comme elle le mériterait, ce sont les omniprésentes et impardonnables fautes de grammaire qui y subsistent. En effet, outre les lourdeurs de style, foisonnent les accords loupés (ne parlons même pas des participes passés, mais simplement du sujet avec le verbe ou de l’adjectif avec le nom), les impératifs bancals, la confusion entre possessifs et démonstratifs, un flou dans le choix des homophones, on en passe et des pires.

À qui voudra donc se lancer dans la prochaine aventure de Vix, on recommandera de boire une bonne lampée de ce whisky irlandais que son héros affectionne tant : une légère ivresse décrisperait le lecteur quant à la forme cahotante de l’ouvrage et lui permettrait, qui sait ?, de plonger, avec plus de tolérance, au cœur du récit.

Samia Hammami
( Mis en ligne le 31/05/2006 )
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