L'actualité du livre
Pocheset Littérature  

Les Désorientés
de Amin Maalouf
Grasset 2014 /  7.9 €- 51.75  ffr. / 525 pages
ISBN : 978-2-253-17481-3
FORMAT : 11,0 cm × 17,8 cm

Première publication en septembre 2012 (Grasset)

Printemps 2001

Le Liban comme point aveugle et aveuglant, jamais cité, partout évident, dans ce roman rassemblant les itinéraires d'hommes et de femmes que la guerre, que les guerres, ont déchirés et séparés. Une jeunesse intellectuelle pulvérisée dans les flammes des années 70 et 80.

Adam, le narrateur, historien antiquisant vivant à Paris, revient au pays qu'il a quitté 25 ans plus tôt, rappelé par Tania, l'épouse de l'ami terrible, Mourad, détesté parce qu'adoré, détesté parce qu'ils firent des choix diamétralement opposés : rester au risque de se compromettre, ou fuir au point de trahir sa terre.

Adam honorera le deuil de son ami, sans l'excuser et, à l'occasion de ce retour chez lui, rassemblera en idées et en faits les restes de ses jeunes années, les amis perdus de vue, les souvenirs éparpillés, quelques secrets tus aussi. Ils formaient l'un de ces cénacles universitaires intellectuels que les flammes du marxisme et du structuralisme avaient échauffés ; ils se nommaient ''les byzantins'' et songeaient à refaire le monde. La guerre comme point final aux rêves, aux idéaux, dans le déchirement des tribus, des factions, des puissances et des religions : "Nous nous proclamions voltairiens, camusiens, sartriens, nietzschéens ou surréalistes, nous sommes redevenus chrétiens, musulmans ou juifs, suivant des dénominations précises, un martyrologe abondant, et les pieuses détestations qui vont avec".

Semiramis, l'amie amante qui tient un hôtel qu'elle cultive comme une illusion du paradis. Albert, l'esprit pur et clair, parti aux États-Unis travailler pour le Pentagone, après une tentative de suicide avortée (partir comme cela, aussi). Ramez, devenu architecte puissant, avec l'ami inséparable, Ramzi ; inséparables ou presque... Devenu frère Basile, Ramzi est allé étancher sa propre soif d'absolu dans les ombres d'un monastère. Bilal, le premier parti, mort les armes aux mains. Son frère Nidal, converti à l'Islam le plus radical. Naïm enfin, juif exilé au Brésil où il est journaliste.

Le récit superpose à une focalisation externe les notes à la première personne d'Adam, au fil d'une structure linéaire, suivant les 16 journées de ce retour aux sources. Un peu trop linéaire peut-être, un peut trop didactique parfois, trop pathétique aussi, n'esquivant pas toujours les descriptions inutilement appuyées, Les Désorientés brosse toutefois efficacement les portraits d'un pays, d'une époque et d'une génération, saupoudrant ici et là quelques réflexions sur l'état du monde tel qu'il va : le conflit Arabe, Israël, l'Islam, l'Occident tel qu'il est, tel qu'il se voit.

Et pour mise en relief discrète mais décisive, l'année de ces retrouvailles : nous sommes au printemps 2001...

Thomas Roman
( Mis en ligne le 12/05/2014 )
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