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Pocheset Littérature  

Les Amants du Spoutnik
de Haruki Murakami
10/18 - Domaine étranger 2004 /  7.30 €- 47.82  ffr. / 270 pages
ISBN : 2-264-03932-9
FORMAT : 11 x 18 cm

Traduit du japonais par Corinne Atlan

Magistral

Les Amants du Spoutnik met en scène un triangle amoureux. K., instituteur désabusé, est amoureux de sa meilleure amie Sumire, une jeune femme fantasque qui tente de devenir écrivain. Mais Sumire tombe folle amoureuse de Miu, une splendide femme d’affaires, aussi raffinée que discrète. Miu finit par engager Sumire pour de menus travaux de secrétariat, puis lui propose de la suivre dans différents voyages de travail qu’elle effectue en Europe. K. reste le confident privilégié de Sumire, et il est également le narrateur de cette histoire. Les deux femmes finissent par échouer sur une île grecque coupée du monde, mais Sumire disparaît brutalement. La belle Miu demande alors à K. de venir à sa rescousse.

Murakami est un auteur culte au Japon, et également en France. Son écriture fluide, décomplexée, inimitable, fait penser au cours limpide d’une rivière qui de temps en temps s’emballe et gronde, pour finalement revenir à son calme initial. L’intrigue proposée dans Les Amants du Spoutnik pourrait annoncer un roman policier, mais il n’en est rien. Le récit, parcouru dès le départ de signaux étranges – qu’en est-il du passé mystérieux de Miu ? –, semble construit sur un mode schizophrénique : la première partie, ancrée dans la réalité, propose la description à la fois précise et limpide, d’un trio amoureux contemporain. Puis, à partir de la disparition de Sumire, l’histoire bascule totalement dans l’onirisme et le fantastique. La quête proposée devient alors celle des profondeurs psychologiques des personnages, aux prises avec leur part d’ombre. L’inquiétante étrangeté gagne peu à peu tous les recoins du récit, qui devenant métaphore et allégorie, fouille la nuit noire de l’âme et semble en extraire le secret : «C’est à ce moment que j’ai compris. Compris que nous étions de merveilleuses compagnes de voyage l’une pour l’autre, mais en fait à la façon de blocs de métal solitaires, qui suivent chacun leur trajectoire. Vu de loin, ça paraît aussi beau qu’une étoile filante ; seulement, dans la réalité, nous ne sommes que des prisonniers, enfermés dans nos habitacles de métal respectifs, incapables d’aller où que ce soit. De temps en temps, les orbites de nos satellites se croisent, et nous parvenons enfin à nous rencontrer. Nos cœurs réussissent peut-être même à se toucher. Mais juste un très bref instant. Sitôt après, nous connaissons de nouveau une solitude absolue. Jusqu’à ce que nous consumions et soyons réduits à néant.»

Caroline Bee
( Mis en ligne le 07/12/2004 )
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