L'actualité du livre
Pocheset Littérature  

Solos d'amour
de John Updike
Seuil - Points 2006 /  7.80 €- 51.09  ffr. / 400 pages
ISBN : 2-7578-0132-5
FORMAT : 11,0 x 18,0 cm

Première publication (France) en septembre 2005 (Seuil - Cadre vert).

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Michèle Hechter.


Toutes passions intactes

John Updike est de ces grandes figures de la littérature américaine installées depuis plusieurs décennies dans le paysage éditorial, à l’instar de John Irving ou de Philip Roth. Et, comme dans leur cas, les amateurs attendent chaque nouvel opus avec gourmandise. Les mauvaises langues pourraient croire dans le cas d’un auteur qui atteint aujourd’hui l’âge 75 ans, que le talent s’épuise, que le style se fossilise. Ce recueil de nouvelles balaie les doutes.

«On peut aller sur la face cachée de la Lune, en revenir, et ne rien trouver de plus merveilleux, de plus étonnant, que la façon dont les hommes et les femmes se débrouillent entre eux.» Cette phrase d’un des protagonistes de «Solos d’amour au cœur de la guerre froide», nouvelle à laquelle le livre emprunte son titre, pourrait être vue comme une confidence de l’auteur, tant elle semble sous-tendre l’entreprise d’Updike au fil de ses livres, menée avec brio : la description des relations de couple et de leurs interactions psychologiques. Et à cet égard, l’écrivain américain est toujours au meilleur de sa forme.

Mieux : il utilise les problématiques qu’on imagine être les siennes, la vieillesse, le temps qui passe et la nostalgie, pour donner leur couleur à ces nouvelles d’amour, qui parlent beaucoup de retrouvailles d’anciens amants. Ainsi, ce qui constitue parfois l’épilogue de certains romans ou de films, quand l’homme et la femme se croisent par hasard vingt ans après, toutes passions éteintes, devient ici le motif principal. Mais toutes passions éteintes, c’est vite dit ! Car chez les personnages d’Updike comme chez l’écrivain, le cœur ne vieillit pas aussi vite que le corps (voir à cet égard la remarquable «Métamorphose»). Le temps écoulé ne clôt pas les choses, il semble les laisser en suspens de sorte que trente ans après, on peut éprouver une jalousie intacte à voir une ancienne maîtresse remariée.

Comme souvent chez Updike, l’infidélité est récurrente, sans jamais être le ressort de l’intrigue. Elle est une simple donnée de départ autour de laquelle prennent place les sentiments jamais stéréotypés, toujours surprenants et pourtant justes, que provoquent les situations d’adultère très banales. Comme John Updike l’expliquait à Michel Crépu qui l’évoquait à juste titre comme un écrivain de la banalité dans une interview à L’Express, «la question, en littérature, c’est d’arriver à faire de la musique avec tout ça...» Et quelle musique !

Les aficionados retrouveront à la fin du livre, dans un récit entre le roman et la nouvelle, l’alter ego de l’auteur, Rabbit, personnage phare de ses livres (Rabbit est riche, Rabbit rattrapé). Ou plutôt, ils retrouveront sa famille, puisque Updike a mis fin à son existence avec Rabbit au repos, paru en 1990. Mais même mort, il continue de jouer des tours à son entourage. Les lecteurs friands de la description des mœurs amoureuses et des rapports hommes/femmes doivent donc se procurer ce livre.

Elise Goldberg
( Mis en ligne le 27/10/2006 )
Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024
www.parutions.com

(fermer cette fenêtre)