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Pocheset Littérature  

L'Arbre du voyageur
de Hitonari Tsuji
Gallimard - Folio 2005 /  5.40 €- 35.37  ffr. / 198 pages
ISBN : 2-07-031467-7
FORMAT : 11,0cm x 18,0cm

Première publication française en avril 2003 (Mercure de France).

Trouver le frère, tuer le frère

Ses parents viennent de disparaître. Seul au monde, le narrateur trouve sa bouée de sauvetage en un frère parti trop tôt, l’étrange Yûji, lointain même du temps de sa présence, électron libre toujours hors du noyau familial. L’absence prolongée, la distance toujours maintenue, rendent les retrouvailles d’autant plus nécessaires et l’aîné, largement idéalisé. L’Arbre du voyageur est le récit de cette quête, cristallisation fraternelle sous forme d’une petite croisade urbaine…

Ultra-urbaine même, puisque Tokyo, la ville pieuvre sans centre ni périphérie, ses gratte-ciels en gris et sang, leurs lueurs rouge et jaune, éclats de cimes saluant les avions migrateurs, est le cadre quasi-onirique d’un court roman qui aurait pu être une nouvelle. La construction n’est pas des plus novatrices : le jeune homme avance par étapes, de l’appartement délaissé par son frère aux maîtresses - Hisami Shinoda et Atsuko Iwano – en passant par le collègue et ami, Yasuda, pas moins illuminé que l’objet de l’enquête.

Quel est le but de celle-ci ? Informer le fils fugitif du décès des parents communs ? Rattraper le temps perdu et la distance ? Confirmer de visu une correspondance, fût-elle infime, des gênes ? Qu’est-ce qu’être frères ?... «Mon existence se réduisait à cette ombre falote qui attendait, assise sur une marche glacée, l’arrivée d’une femme peut-être liée à mon frère disparu. Soudain seul au monde, drapeau sans couleurs abandonné au gré du vent, je continuais à flotter dans une solitude lointaine et irréelle. Rechercher mon frère était sans doute la seule chose qui me rattachait encore à la réalité» (p.45) Le narrateur cherche un reflet…

Et on le suit volontiers dans cette jungle des sentiments inscrite en jungle urbaine, le temps de cette course éthérée mais essentielle, qu’on accompagnerait, pour la musique, des sons ouatés et mélancoliques d’un Brian Eno, quelques airs alternatifs façon Mazzy Star, et, pourquoi pas, les basses trip-hop d’un bon vieux Massive Attack…

Bruno Portesi
( Mis en ligne le 18/01/2006 )
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