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Bande dessinéeet Autre  

L’Encyclopédie des débuts de la Terre
de Isabel Greenberg
Casterman 2015 /  24 €- 157.2  ffr. / 174 pages
ISBN : 9782203088528
FORMAT : 21,5x30 cm

Genèses en gigogne

C’était il y a fort longtemps, du temps où trois lunes se partageaient le
ciel. Un jeune homme raconte à sa fiancée, qu’il ne peut approcher du fait
d’une bizarrerie magnétique, l’histoire des trois sœurs de l’île d’été, qui
élevèrent trois garçons à partir d’un seul, lequel, réunifié, devint un
fameux conteur. Et ce conteur, parti chercher un bout de son âme de l’autre
côté du monde, sut charmer les dieux et les hommes, qui à leur tour lui
racontèrent des histoires d’hommes et de géants, de batailles et de dieux,
des histoires qui évoquent chacune les origines du monde des hommes et qui,
insensiblement, tissent autour du monde un manteau d’histoires, qui s’étend
du Nord au Sud, d’un pôle à l’autre. Tel Ulysse, ou Homère, le conteur
devient le propre héros de son histoire, une histoire qui l’emmène de
l’autre côté du globe.

Il est magique, cet album qui, partant d’un univers inuit, descend peu à
peu, et au fil des contes narrés par les uns et les autres, jusqu’aux
contrées tropicales, avant de parvenir au pôle sud. Avec Isabel Greenberg,
une jeune et talentueuse illustratrice, on se promène dans un univers où les
dieux et les hommes cheminent de concert, un univers à la fois très onirique
d’un point de vue graphique, et très traditionnel quant aux contes évoqués.
Chaque récit s’emboîte dans le précédent selon une logique simple (le
conteur apprenant des autres de nouveaux contes). On découvre au passage une
déclinaison inuit de l’Odyssée, du mythe de Babel et de l’histoire de Jonas
avalé par une baleine, des histoires de géants gourmands, de dieux amoureux,
de shamans maladroits, de phénix servis à table, de création du monde et des
hommes… une véritable mythologie, dessinée avec amour.

Car Isabel Greenberg a su mettre en scène ces histoires, qui semblent
d’authentiques récits inuits, à l’aide de quelques éléments : on ne peut
qu’être impressionné par le contraste entre la sobriété des moyens (de la
gouache, quelques couleurs et une feuille blanche immaculée) et la splendeur
du résultat, entre hommage et pastiche d’un art traditionnel remis au goût
du jour. Chaque planche est, en soi, un petit moment de grâce, qui entraîne
le lecteur à la suite du conteur, dans sa découverte du monde, du pôle nord
au pôle sud. L’ensemble est envoûtant et enchantera jeunes et moins jeunes,
sensibles à une esthétique originale et à de beaux contes mis en scène avec
talent. Un auteur à surveiller de près.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 20/12/2014 )
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