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Bande dessinéeet Historique  

Jour J (tome 26) - La ballade des pendus
de Jean-Pierre Pécau , Fred Duval et Lajos Farkas
Delcourt - Neopolis 2016 /  15.50 €- 101.53  ffr. / 64 pages
ISBN : 9782756053561
FORMAT : 24x32 cm

Jeanne tourne mal…

Et si la grande peste du milieu du XIVe siècle avait été une très grande peste, une peste si importante qu’elle aurait véritablement dévasté l’occident et tué le christianisme ? L’hypothèse, déjà brillamment développée par l’écrivain de SF Kim Stanley Robinson (Chroniques des années noires) est ici renouvelée avec talent : dans une France en quasi guerre civile – la guerre de Cent ans continue même dans les histoires alternatives – l’ambassadeur du puissant royaume du Mali accoste. Sa mission : assister au vote qui va attribuer la couronne de France… Un enjeu immense, sans doute trop. Car pour assister à cet événement, il faut traverser une France gangrenée par la guerre, les grandes compagnies, les écorcheurs (ces bandes de pillards), la peste et la famine… sans compter le froid. Et si l’ambassadeur est bien protégé par ses 200 amazones, il faut compter avec les complots, embûches et traquenards qui le menacent, lui, le représentant d’un royaume assez riche pour peser de tout son poids d’or dans une telle décision. Mais dans ce qui ressemble à une mission impossible, le hasard se dévoile sous la forme d’une jeune femme, étonnante, une guerrière redoutable autant qu’habile, sans trop de foi ni de loi et qui, à la tête de sa compagnie blanche, se vend au plus offrant pour faire la guerre. Elle a nom Jeanne d’Arc, on la dit pucelle et elle est peut être la seule personne à pouvoir emmener l’ambassadeur jusqu’à Paris, où aura lieu ce vote. Mais dans une France si bouleversée, les meilleurs plans ont toujours des accrocs.

On part d’une belle idée : Jeanne d’Arc, transformée en condottiere, en charge d’escorter non Charles VII, mais un ambassadeur (prétexte : le personnage n’est guère développé), jusqu’à Paris… et au passage, on lui fait traverser une France méconnaissable, entre guerre, famine et épidémies, une France de l’apocalypse où François Villon a décidément mal tourné. Et pour ça, Duval et Pécau, au scénario, n’ont pas lésiné : l’intrigue alterne les complots et les visions cauchemardesques, bien mises en scène par Farkas, qui retrouve dans cet album le style de L’Histoire de France en BD, série culte. On passe de capitales désertées et en ruine aux batailles et assauts, trahisons diverses. Si Aigues Mortes et Lyon figurent de quasi havres de paix, le reste du territoire est recouvert de neige et sombre dans la sauvagerie. Seuls quelques murs, comme ceux des villes fortifiées, séparent les loups du reste du troupeau. Et dans cet univers, Jeanne d’Arc n’est pas le personnage surréel que l’on connaît, mais une guerrière sans états d’âmes… et presque plus réaliste de ce fait. Une variation très réussie, et une exploration renouvelée des paysages de l’histoire alternative.

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 02/12/2016 )
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