Bande dessinée
Historique de Paul Teng , Cristina Cuadra et Rudi Miel
Le Lombard - Polyptyque 2004 / 12.60 €- 82.53 ffr. / 48 pages
ISBN : 2-80361-877-X
FORMAT : 24 x 31 cm
Triple intrigue
L’histoire de L’Ordre impair se déroule sur trois plans. Il y a d’abord l’époque médiévale : en 1297, Mechtilde d’Arras, une jeune femme mystique et lesbienne, meurt sur le bûcher ; mais un texte qu’elle a écrit, Visio Veritatis, échappe aux flammes. Puis il y a l’époque moderne : en 1576, la ville d’Anvers est assiégée par les troupes mutinées du roi d’Espagne Philippe II, et mise à sac ; une jeune fille, Léonora, y pleure la mort de sa mère. Enfin, il y a l’époque contemporaine : de nos jours, entre Bruxelles et Paris, l’auteur de romans historiques Patrick Prada s’intéresse à l’histoire de Mechtilde, tandis que sa femme Virginia, conseillère au Cabinet des Affaires économiques à Bruxelles, est en charge d’un dossier délicat de demande d’exportation de matériel nucléaire vers l’Inde.
Pourquoi, alors, ce titre «Anvers 1585» ? On devine que le lien qui unit ces trois intrigues se noue lorsque la jeune Léonora devient adulte… Mais pour l’instant, on n’en sait pas plus. La collection Polyptyque du Lombard, récemment créée et très prometteuse (voir Le Dernier Livre de la Jungle), annonce cinq tomes pour L’Ordre impair. A l’issue du premier, force est de reconnaître que le suspense est bien entretenu.
En même temps, il s’est passé pas mal de choses en 48 pages : ce premier tome n’est pas seulement un round d’observation, comme c’est trop souvent le cas pour les histoires un peu longues. On ne s’ennuie pas : que ce soit en 1297, en 1576 ou en 2004, l’intrigue avance. Visio Veritatis est retrouvée en 2004 par Virginia ; il se pourrait que Léonora, devenue imprimeuse à Anvers en 1585, ait modifié le texte de Mechtilde, mais on ne sait pas trop. Quant à ce qui advient à Virginia après l’avoir lu, mieux vaut ici ne rien en dire…
Quelques thèmes gouvernent cette histoire : l’amour lesbien, du Moyen-Âge à nos jours ; la guerre, des mercenaires de Philippe II aux risques d’explosion nucléaire au Cachemire ; les livres, enfin, et leur pouvoir mystique. On verra où tout cela va nous mener. «Et le dernier jour règnera l’ordre simple», annonce une prophétie médiévale : que faut-il en inférer pour le dernier album de L’Ordre impair ?
Le dessin de Paul Teng, réaliste, élégant, rappelle parfois celui de Rosinski. L’astuce qui consiste à utiliser deux coloristes différents pour la partie historique (Graza) et pour la partie contemporaine (B. Denoulet) rend également l’album intéressant par la subtilité du changement. Les amoureux de la Belgique, enfin, seront séduits par les décors de la Bruxelles contemporaine et de l’Anvers médiévale, admirablement dessinés. De la belle ouvrage, donc.
Sylvain Venayre
( Mis en ligne le 27/04/2004 )
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