Bande dessinée
Manga de You Higuri
Marvel Panini France 2004 / 8.95 €- 58.62 ffr. / 220 pages
ISBN : 2-84538-331-2
FORMAT : 11x18cm
Le roi fou
Fin du XIXe siècle : le jeune Ludwig – plus connu en France sous le nom de Louis II de Bavière – a toutes les peines du monde à assumer son statut de monarque. Les questions de politique intérieure ne l’intéressent décidément pas, et le protocole l’ennuie terriblement. Le souverain n’aspire qu’à vivre sereinement dans la douceur ouatée du palais royal, où il mène une existence légère et dissolue, multipliant les conquêtes masculines. Mais deux ombres planent sur l’insouciant : tout d’abord la tension qui ne cesse de croître entre l’Allemagne et l’Autriche, obligeant le jeune homme à faire face à ses responsabilités de gouvernant et à choisir son camp. Ensuite, l’impopularité grandissante et le mépris que lui témoigne son peuple, lui reprochant pêle-mêle son inversion, sa lâcheté (Ludwig se gardera bien de se présenter sur les champs de bataille lorsque la guerre éclatera, prétextant son aversion pour celle-ci) ou encore son indifférence aux malheurs de la nation. Les quolibets fusent de tout le pays, sans jamais attendre cet énigmatique roi reclus. Ce dernier, bien trop occupé par les intrigues qui pimentent la vie de la cour, délaisse le sous-lieutenant Taxis pour un jeune écuyer répondant au doux nom de Hornig. Mais c’est un véritable mal-être qui habite Ludwig, en proie à ses pires démons intérieurs.
S’inscrivant dans la droite lignée de Versailles no bara, cette série au romantisme racé ne laisse pas indifférent. Higuri nous offre ainsi une fresque historique très documentée, au service d’une galerie de personnages exaltés : ici se croisent dans une ambiance des plus baroques Wagner, Sissi et bien d’autres, donnant corps à un scénario construit et mûrement réfléchi. Toutes les caractéristiques du shojo sont rassemblées dans ce premier tome : passions dévastatrices, duels entre beaux éphèbes tous aussi graciles et imberbes les uns que les autres, complots démoniaques, rien ne manque, au risque de céder à un style quelque peu grandiloquent et ampoulé. Souvent bavard, parfois pompeux, toujours instructif, ce mélodrame se veut une exploration des sentiments humains et de leurs paradoxes, en particulier via le personnage de Ludwig le roi fou, dont le désespoir raffiné et la mélancolie désabusée hantent chaque page de cette œuvre originale. Le tout superbement illustré par un graphisme élégant et délicat, et agrémenté par un carnet de voyage en fin de volume plutôt drôle, ultime touche de fantaisie pour un manga très réussi.
Océane Brunet
( Mis en ligne le 02/07/2004 )
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