Bande dessinée
Manga de Mari Okasaki
Delcourt 2004 / 5.75 €- 37.66 ffr. / 200 pages
ISBN : 2-84789-483-7
FORMAT : 11x18 cm
L’essence des choses
Maki prend des photos d’adolescentes dénudées à leur insu et en fait un juteux commerce auprès du vieux pervers Ossan. Son amie Yumi, elle, rêve du grand amour. Asaï, un photographe professionnel, propose un jour à Maki de participer à un concours photo. Mais les intentions de l’homme ne sont pas aussi altruistes qu’il n’y paraît et l’un des buts inavoués de la manœuvre est de faire de Maki la rivale de sa petite amie Saï, photographe en mal d’inspiration. Par cette émulation, Asaï espère redonner à celle-ci la hargne et l’audace nécessaires pour la sortir de l’impasse et confirmer son rang d’artiste d’exception.
Ce one-shot porte un regard nostalgique sur cette période dorée qu’est l’adolescence, avec une fascination non dissimulée pour la sensualité qui émane de ces êtres en perpétuelle quête d’amour. Les destins croisés de Maki et Yumi, deux amies naïves assoiffées de reconnaissance – qui semble ne pouvoir passer que par l’accession à une certaine forme de célébrité - offrent au lecteur un portrait sensible et touchant d’une jeunesse partagée entre des rêves de petite fille et une vie d’adulte. Cleptomanes ou perverses, ces adolescentes n’en sont pas moins des personnages à fleur de peau, à la sensibilité exacerbée et à l’érotisme doucement suggestif.
Mais le jeu des manipulations, des rivalités et des coucheries n’évite pas l’écueil du mélo, avec parfois de déroutantes envolées lyriques : « Tu saisis avec une extrême sensibilité ces choses éphémères qui s’évanouissent en un éclair, ce moment d’éternité qui ne reviendra jamais mais reste gravé sur la pellicule », déclare en particulier Saï à Maki pour qualifier ses clichés… On a vu plus simple et moins pompeux, mais ce romanesque un peu poussif s’estompe rapidement dans les ambiances feutrées suscitées par l’auteur : maîtrisant avec art le jeu des différents points de vue qui rend les pensées les plus intimes des personnages accessibles au lecteur, et usant de plans originaux dont le rythme stroboscopique se rapproche d’un style cinématographique, Okazaki nous propose ici un shojo intelligent, intimiste et plein de douceur.
Soulignons de plus que d’autres ouvrages du même auteur suivront, concept plutôt alléchant et peu souvent utilisé pour faire connaître les univers très personnels de mangaka d’exception.
Océane Brunet
( Mis en ligne le 08/08/2004 )
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