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Bande dessinéeet Manga  

Le manoir de l'horreur (vol. 4)
de Ochazukenori
Delcourt 2004 /  5.75 €- 37.66  ffr. / 210 pages
ISBN : 2-84789-507-8
FORMAT : 11 x 18cm

Horreur à la japonaise

Retour sur notre chère Kayo dans ce nouveau tome, qui se fait bêtement descendre par un tireur d’élite de la police, ignare et aux manières quelque peu expéditives : pensant mettre ainsi fin à une série de morts violentes qui frappent l’entourage proche de la fillette, les autorités ne font pour ainsi dire que remuer le couteau dans la plaie…

Chiaki, elle, nourrit un ressentiment excessivement malsain envers sa petite sœur, source de toutes les attentions de sa mère. Ou quand l’angoisse abandonnique pousse aux pires folies…

Quant à Yukiko, son premier amour s’annonce plutôt dévastateur et le bellâtre de ses rêves, un être pour le moins exclusif et jaloux…

Ochazukenori poursuit dans ce volume son voyage au bout de l’horreur, toujours sous forme de saynètes terriblement efficaces, avec un art de la chute qui n’est plus à démontrer. Sanguinolentes et porteuses d’une violence brute, ces courtes histoires au style savamment dépouillé se veulent une allégorie de l’impuissance de l’Homme face au Mal, avec une focalisation très intéressante sur le huis clos qu’est la famille, source immanquable de conflits, de rancœurs et de non-dits étouffants à porter pour l’individu. Ce bouillon de culture malsain est chez Ochazukenori le catalyseur d’une grande partie des ressentiments des protagonistes, rongés avant tout par la jalousie et l’envie. Et même l’amour n’échappe pas à cette décapante décortication des travers humains, dénoncé comme l’une des principales causes de tous nos malheurs.

Vision excessivement pessimiste des êtres, la série nous présente ainsi sans ambages le meurtre comme une seconde nature chez des personnages en proie à des passions intérieures d’une violence insupportable, et dont les visages émaciés suintent une peur et un désespoir saisissants. Entre fantasme et réalité, leurs existences tourmentées confrontent le lecteur à une angoisse viscérale sourde, accentuée par le flou artistique que l’auteur laisse volontairement planer sur chacune de ses nouvelles : en effet, aucune clef n’est donnée par ce dernier pour apporter un peu de paix et de bonne conscience à son public.

Pas de solution claire ni de justification aux actes de ses personnages donc, pas plus que de tentative de rationalisation d’un monde qui nous échappe progressivement pour basculer dans l’horreur la plus totale. L’auteur abandonne ainsi le lecteur à un univers profondément immoral et cruel, se drapant dans un mutisme effroyablement inquiétant. N’attendez aucune compassion de ce maître de l’horreur qui ne semble jamais juger les faits et gestes de ses héros, et encore moins les condamner. Dérangeant…

Océane Brunet
( Mis en ligne le 15/09/2004 )
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