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Bande dessinéeet Réaliste  

Les Rois vagabonds
de James Vance et Dan Burr
Vertige Graphic 2003 /  17 €- 111.35  ffr. / 208 pages
ISBN : 2-908981-83-1
FORMAT : 17 x 24 cm

Sur la route

Ce long récit de près de deux cents planches relate l’histoire de Freddie Bloch, jeune gamin de douze ans devenu vagabond par la force des choses et qui deviendra adulte plus vite que prévu à travers un épique périple initiatique. Reprenant la grande tradition du "road book", Les Rois vagabonds puisent dans l’œuvre de Jack London (Les Vagabonds du rail), de Mark Twain, souvent cité dans cet album, ou de John Steinbeck dont Les Raisins de la colère ont sans doute été une source d’inspiration pour les auteurs de cette fresque. Car plus que les grands espaces ou la belle aventure, c’est bien le social qui est mis en avant ici.

Trois années après le début de la Grande Crise de 1929, le père de Freddie part vers Detroit chercher un emploi. Le chômage touche tout le monde et la révolte gronde. Le jeune garçon abandonné partira à la recherche de son père et c’est sur les routes qu’il fera la connaissance de toute une communauté solidaire et inattendue ; celle des hobos, vagabonds qui vont de ville en ville à la recherche de petits boulots. À leur contact, Freddie sera confronté à de nombreux événements et péripéties qui lui permettront de découvrir les coulisses délabrées d’une Amérique ruinée et qui semble ne plus pouvoir se remettre de ce coup de massue économique.

Ancré dans une réalité historique précise et passionnante, parsemé de détails véridiques, Les Rois vagabonds se laissent lire avec intérêt et le souci documentaire apporte à l’ensemble une crédibilité précieuse. On peut toutefois regretter ce qu’est devenue la bande dessinée dans cette entreprise. Ce genre de graphic novel qui se doit avant tout de raconter une histoire s’accompagne en général relativement bien d’un style classique et sobre ; hélas ici, le trait de Dan Burr semble hésiter entre un classicisme vieillot et une modernité maladroite (hachures ou soudaines étranges facéties de cadrage). Il ne suffit pas d’avoir un bon scénario pour faire un grand album, et celui-ci reste malheureusement cloisonné par un découpage manquant sensiblement de rythme. Le dessin n’a sans doute pas le souffle nécessaire pour donner à ces personnages la prestance indispensable, et l’on se surprend à regretter que l’histoire ne soit pas passée sous les yeux de quelque autre dessinateur moins timide.

Reste tout de même une belle et grande histoire qui permet de découvrir des facettes peu connues de l’Amérique en crise, comme ces manifestations violentes devant les usines Ford. L’ensemble reste de bout en bout honnête et authentique, jamais racoleur ou sensationnel. C’est sans doute ce qui fait avant tout sa force.

Alexis Laballery
( Mis en ligne le 02/01/2004 )
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