Bande dessinée
Réaliste de Zep
Seuil - Points 2008 / 7 €- 45.85 ffr. / 200 pages
ISBN : 978-2-7578-1094-1
FORMAT : 11cm x 18cm
Première publication en mars 2006 (Seuil).
Encore une tranche, Mr Zep…
Il y a des gens qui ont le chic pour traduire simplement, d’un coup de crayon, des choses compliquées, des états d’âmes, des rêves… et le papa de Titeuf fait partie de ces gens-là. Dans la veine de Dupuy et Berberian (Journal d’un album), de Lewis Trondheim (Approximativement, Les Carnets…) ou de Manu Larcenet (Le Combat ordinaire), Zep se lance dans l’autobiographie imagée et existentielle, pas un journal intime mais plutôt un point de vue rapide sur l’univers… Que du bonheur !
En 22 chapitres et autant de tranches de vie, de 3 ou 4 pages, Zep croque son moi intérieur, son univers, son entourage, sa vie de trentenaire. Zep, c’est un peu une valeur sûre en BD, le genre d’auteur dont on achète le dernier album les yeux fermés : le trait, l’humour sont connus, qui font le charme des aventures de Titeuf ou de L’Enfer des concerts. Toutefois, il ne s’agit pas d’enchaîner les gags, mais le sourire, tout en sympathie, est au rendez-vous. Les fans peuvent tranquillement acquérir ce nouvel album (aujourd'hui passé au format de poche) qui témoigne une fois de plus de l’immense talent de cet auteur, capable de faire rire les enfants et les adultes, et de les toucher dans le même temps (sacrée performance). Un album plus introspectif, plus personnel, plus profond, un ensemble de croquis pris sur le vif, rassemblés et liés par cette qualité rare : le talent.
L’album est à la fois séduisant et dangereux parce que l’on finit par s’identifier à son auteur : comme lui, on a rêvé de super pouvoirs (voyager dans le temps, voir à travers les murs et les vêtements, voler comme superman…), comme lui, on voudrait militer davantage pour des vrais sujets sérieux (la nature, l’écologie…), comme lui, on a des rêves de jeunes qui attendent dans un coin d’être exaucés (devenir une star du rock, comprendre l’art contemporain, connaître l’amour…), comme lui, on sent bien que le monde est une vaste blague et qu’il est urgent de retourner sur notre planète d’origine (pour Zep, ce serait Pluton ?)… Du reste, le dernier chapitre («My generation») est un bon résumé de l’entrée dans l’âge adulte (le vrai, celui où l’on devient soi-même l’adulte de quelqu’un d’autre). Bref, comme Flaubert pour Mme Bovary, le lecteur peut jutement dire «Zep, c’est moi»… mais un Moi inspiré, fantasque, poète, capable d’illuminer le quotidien à l’aide d’un dessin… si c’est pas un super pouvoir, ça ? Un grand album, Mr Zep !
Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 16/12/2008 )
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