Bande dessinée
Chroniques - Autobiographie de David Prudhomme
Futuropolis 2012 / 17 €- 111.35 ffr. / 80 pages
ISBN : 978-2-7548-0785-2
FORMAT : 24,5x32 cm
Visite guidée
Septième volume de cette belle collection qui n’en espérait sans doute pas tant. Avec ce partenariat entre le musée du Louvre et Futuropolis, le lecteur a droit à des albums d’une belle qualité, répondant à la fois à un cahier des charges précis (un aperçu du musée et de ses collections), tout en laissant la part belle à la personnalité de chaque auteur. On n’est pas là dans une production sclérosée, enfermée par les contraintes mais bel et bien dans un vaste domaine ouvert aux investigations narratives, un large territoire à défricher et capable de titiller aussi bien l’imaginaire que l’Histoire ou la romance.
Au tour donc de David Prudhomme de s’y coller. C’est, depuis le début de cette collection, la visite la plus « normale », la plus linéaire du musée. Elle n’a pas lieu dans un futur éloigné (Période glaciaire), ni dans le passé (Le Ciel au-dessus du Louvre), ni la nuit lorsque les salles sont fermées (Un enchantement), ni dans les souterrains (Les Sous-sols du Révolu), et le fantastique n’intervient pas (Aux heures impaires, Rohan au Louvre). On a juste un visiteur (David Prudhomme lui-même) qui traverse la Louvre après avoir perdu son amie près des Rembrandt. D’une salle à l’autre, l’auteur-personnage capte des moments insolites ou poétiques, confrontant œuvres et visiteurs avant de les englober dans un même espace, un même regard : « (…) ce qui me plaît surtout, c’est d’observer les gens qui regardent les œuvres. », avoue l’auteur.
Et lorsque cette fine observation se mue en dessin, c’est à une galerie d’illustrations où l’interaction entre spectateur et œuvres est sans cesse en branle. Il y a le regard du photographe d’abord, lorsque la posture d’un visiteur fait écho à celle d’une sculpture, ou le dialogue muet entre un agent de surveillance et une statue égyptienne. Mais il y a aussi le geste pur du dessinateur, comme lorsque la foule devant la Joconde devient – grâce au même traitement crayonné – une nouvelle assemblée de convives au banquet de Cana. Pour Prudhomme, chaque salle est un nouvel univers à découvrir avec ses sketches, ses rencontres insolites, ses parallèles improbables. Lui, chapka sur la tête et sac en bandoulière est prêt pour une randonnée au long cours dans ce labyrinthe culturel, et son enthousiasme contagieux fait plaisir à lire.
La progression de l’album suit celle d’une visite classique du Louvre : on s’y perd, on revient sur nos pas, on tombe sur des œuvres classiques ou des pures découvertes qui arrêtent votre marche. Prudhomme varie les cadrages et le rythme des séquences: strips, illustration en pleine page, gros plan ou vue d’ensemble… Son livre est comme un collage, un inventaire de situations avec des thèmes récurrents (les têtes coupées, la foule, les couples, les files indiennes…), et une impression de promenade fantaisiste, loin des visites guidées rébarbatives.
Alexis Laballery
( Mis en ligne le 10/06/2012 )
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