Bande dessinée Chroniques - Autobiographie |
13/11 - Reconstitution d’un attentat de Anne Giudicelli et Luc Brahy Delcourt 2016 / 15.50 €- 101.53 ffr. / 126 pages ISBN : 9782756083810 FORMAT : 23x18 cm Docu BD Les attentats du 13 novembre 2015 demeurent, dans l’opinion française, un traumatisme absolu, le sentiment d’une fragilité de la société confrontée à une équipée d’assassins qui ont érigé le meurtre en dogme religieux. Mais au-delà de l’idéologie et de sa perversité intrinsèque, reste le mécanisme qui aboutit à la tuerie. Le « Comment » est, à cet égard, presque aussi important que le « Pourquoi » ? Comment ces hommes sont-ils parvenus aussi aisément à perpétrer leur attentat ? Qu’est-ce qu’un terroriste ? De quoi se nourrit-il ? A quoi ressemble la vie d’un homme qui veut tuer et mourir, ses derniers jours, ses dernières heures ? Comment s’organise un attentat ? Comment peut-on tuer de sang-froid au sein d’une foule ? Ou alors pourquoi hésite-t-on au dernier moment ? Et comment, après, se met en place l’enquête, la traque ? Autant de questions posées par cette enquête, traduite en BD avec un souci du détail et de la pédagogie indiscutables, sans complaisance ni fascination pour la violence : une analyse neutre, un ton sobre et raisonnable. Il s’agit, avec l’arrivée en Europe le 9 septembre 2015 des tueurs, de suivre leur équipée, les planques, les conversations, la préparation de l’attentat, mené jusqu’à son terme, puis les lendemains, la fuite des uns, la traque et son final sanglant. Cela pourrait être un bon thriller, mais c’est en fait une réalité sinistre, efficacement présentée. Le concept de documentaire BD n’est pas évident : il s’agit d’évoquer, minute par minute, depuis le 9 septembre 2015 jusqu’à la fin de la traque, les étapes de cette crise. La mise en scène fait justement très « documentaire », jusque dans ses plans et ses coupes, son commentaire, les visages esquissés comme pour une audience de justice ou des portraits robots. On a l’impression d’être en train de lire le story-board d’un documentaire télé. Est-ce beau ? Est-ce que l’esthétique est ici l’enjeu majeur ? Luc Brahy ne fait pas dans l’esthétisation du terrorisme : on est dans le réel, le brutal, la vraie vie. Alors l’image est sobre et vise à l’efficacité. Le scénario (mais faut-il parler de scénario ?) d’Anne Giudicelli est taillé comme une enquête, vif, rythmé, avec des commentaires courts, alternant les tueurs et les cibles (l’Etat, la France, la population civile), les contrastes entre le complot des uns et les discours publics des autres, les parallèles entre l’Irak et la France. On passe les frontières, on voisine avec les terroristes. Le document est à la fois solide, bien mené, et indiscutablement glaçant, l’impression d’irréalité demeure. Pour ceux que les attentats du 13 novembre intriguent, et qui veulent en comprendre les détours, un bel exemple de journalisme dessiné. Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 23/12/2016 ) |
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