L'actualité du livre
Bande dessinéeet Humour  

Nestor et Polux
de Fabrice Tarrin , Fred Neidhardt et O'Groj
Onapratut 2009 /  12.50 €- 81.88  ffr. / 96 pages
ISBN : 978-2-9525620-5-9
FORMAT : 17x24 cm

Le nonsense de la vie

En 2004, avec la renaissance de Pif Gadget, plusieurs séries inédites ont vu le jour. Parmi elles, il y en eut une qui se détacha rapidement du reste, Nestor et Polux. À la barre, trois pirates de la bande, trois contrebandiers qui n’avaient pas froid aux yeux et, au sein de ce magazine plutôt destiné à la jeunesse, balançait une série totalement originale, totalement folle, entre potacherie ultime et cours de philo digest’. Après un recueil plutôt laid et incomplet sorti en 2005 chez Pif, les éditions Onapratut ont eu la bonne idée de rééditer l’intégrale de ces planches.
Le postulat de départ est on ne peut plus simple, réduit à trois acteurs et un objet : chaque jour, Nestor et Polux attendent patiemment que le frigo devant lequel ils sont assis s’ouvre. À l’intérieur, deux yaourts. L’un, dégoûtant, au pruneau, l’autre, succulent, à la framboise. Lorsque les deux bestioles voient le frigo s’ouvrir, c’est la ruée vers la framboise, quitte à se chamailler, en attendant le lendemain lorsque le même cirque recommence, ad vitam. Le responsable de ce nonsense de la vie, c’est Dieu. Plus précisément, Dieu Triangle, qui veille dans le ciel sur ses deux créatures, attaché à son fil pour ne pas se casser la figure.

Au fil des épisodes, la situation de départ prend de l’ampleur et dégénère jusqu’à ce que le petit sketch initial devienne une véritable saga avec ses rebondissements ahurissants, ses sauts dans l’espace, ses trépas burlesques et ses retours à la vie. Les idées fusent dans tous les sens et, par on ne sait trop quel miracle, les auteurs parviennent toujours à retomber sur leurs pattes, juste après deux-trois pirouettes enchaînées. L’humour joue sur l’absurde pur, mais vient aussi piocher dans le scato d’un côté et la critique cynique de l’autre. La gentille bêtise de Polux contraste parfaitement avec la jalousie névrotique de Nestor et le couple fonctionne à merveille, formant comme un nouveau duo instantanément classique de la bande dessinée. Quant à Dieu, c’est un imbécile malheureux, qui a raté son monde et est devenu la risée des autres Dieux. Sans jamais chercher à enfoncer le clou du double sens – la bande est avant tout une grosse et bonne blague – les auteurs s’amusent avec la religion et n’hésitent pas à mettre les pieds dans le plat. On aurait là - le titre parle de lui-même – comme une parodie de mythe antique, avec ses héros, ses axiomes de départ, ses dieux, ses génies, ses résurrections, ses transformations, ses miracles et ses leçons à en tirer. Le tout enrobé dans une bonne dose de n’importe quoi, et enjolivé par les dessins dynamiques d’un O’Groj à l’aise dans cet univers bien barré.

La bande dessinée la plus drôle de l’année. Et aussi celle de l’année prochaine.

Alexis Laballery
( Mis en ligne le 18/12/2009 )
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