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Histoire & Sciences socialeset Période Moderne  

Les derniers Médicis
de Harold Acton
Perrin - Collection Pour l’Histoire 2003 /  23 €- 150.65  ffr. / 366 pages
ISBN : 2-262-02009-4

Les derniers Médicis

Qui d’autre mieux qu’Harold Acton, esthète et érudit anglais du siècle dernier, pouvait offrir ce tableau à la fois juste et brillant des ultimes feux jetés par les derniers Médicis aux XVIIème et XVIIIème siècles ? Compagnon d’Evelyn Waugh, de T.S. Eliot ou encore d’Aldous Huxley, voyageur impénitent, naviguant entre Chine et Italie, où l’un de ses aïeuls fut d’ailleurs Premier ministre du roi Ferdinand IV de Naples, Harold Acton nous peint, dans un récit léger, enjoué, mais aussi dramatique, l’histoire de ces derniers Médicis, jusqu’à son point final : leur extinction, sans gloire, à la mort de Jean-Gaston, dernier rejeton mâle de la dynastie.

Quoi de commun en effet entre les règnes brillants des premiers Médicis, municipes pourtant sans couronne, et les derniers du nom, de Cosme II (1609-1621) à Jean-Gaston (1723-1737), en passant par Ferdinand II (1621-1670) et Cosme III (1670-1723), dotés, eux, pour le coup, depuis Charles Quint, de la dignité ducale, et même grand-ducale ?

L’histoire de ces années ultimes est celle d’une décadence inexorable malgré une histoire, un nom, des traditions et un patrimoine ô combien prestigieux. Economiquement, les campagnes et les villes toscanes, naguère florissantes (Pise, Sienne, Lucques, le joyau florentin), ne suffisent plus à assurer la belle santé économique et la diplomatie insolente des premières années. Le Grand-Duché a beau entretenir des diplomates dans toutes les capitales, leur rôle n’est plus guère que symbolique. Les derniers Médicis ont aussi perdu la grande habileté gestionnaire de leurs ancêtres. Les villes sont écrasées sous l’impôt et les campagnes laissées à l’abandon. Les cités se vident désespérément devant une administration impuissante ou lasse.

C’est dans cette ambiance fin de règne que se joue la comédie, dramatique, des derniers souverains. Comédie car l’on ne se lasse pas du souvenir glorieux des siècles passés. Les arts et les lettres sont toujours encouragés. Florence poursuit sa mue éternelle. Eglises et religieux occupent sans discontinuer une place de choix dans la vie des cités. Dramatique aussi, parce que l’on sent que l’ardeur et la passion n’y sont plus tout à fait. La priorité devient autre au fil des années, toujours plus obsédante : la préservation de l’antique race. Car les héritiers, au tournant des deux siècles, viennent à cruellement faire défaut. On cherche désespérément des alliances dans les vieilles cours européennes ; on en vient même à rendre à la vie civile un prélat Médicis. Le vieux Cardinal François-Marie est jeté dans les bras d’une princesse italienne. En vain. L’ambiance en Toscane devient lourde. Cosme III plonge son pays dans une dévotion effrénée qui finit par interloquer jusqu’aux moins sceptiques. Les diplomates cherchent auprès des cours étrangères le moyen de conserver le patrimoine ancestral aux mains de la famille ou tout au moins de « cousins » italiens. Car les appétits, espagnols ou autrichiens, deviennent avides. Pourtant rien n’y fait. A la mort de Jean-Gaston, souverain neurasthénique, malade pathétique, et à l’issue d’arbitrages européens, l’héritage Médicis tombe dans les mains du Prince François de Lorraine. Après ces longues années de déshérence, personne n’est cependant là pour regretter la fin de ces marchands devenus princes.

Alexis Vialle
( Mis en ligne le 22/04/2003 )
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