L'actualité du livre
Histoire & Sciences socialeset Période Contemporaine  

Holocauste : les sources de l’histoire
de Raul Hilberg
Gallimard - NRF Essais 2001 /  15.88 €- 104.01  ffr. / 234 pages
ISBN : 2-07-076199-1

Nomenclature de l’horreur

L’historien américain Raul Hilberg est actuellement l’un des plus grands spécialistes mondiaux du génocide des juifs pendant la Deuxième Guerre mondiale. Son livre, la Destruction des juifs d’Europe, paru en 1988 aux éditions Fayard demeurera longtemps l’ouvrage de référence sur un sujet aussi vaste. La traduction de Sources of Holocaust research par les éditions Gallimard offre une toute autre vision du même sujet. Il s’agit là d’un livre qui est le fruit de plusieurs dizaines d’années de travail. L’auteur présente ici, en forme de nomenclature, la variété des sources que l’historien du génocide peut utiliser.

On est comme étourdi par une telle abondance qui ne concerne pas seulement - c’est là l’un des aspects les plus intéressants de l’ouvrage - les sources allemandes, celles des auteurs, mais aussi les sources juives, celles des victimes. Des journaux (diairies), des photographies, des témoignages sont autant de matériaux variés pour l’historien de ce phénomène sans précédent dans l’histoire. Raul Hilberg en archéologue méticuleux décrit ces sources et les classe, traquant jusque dans ses moindres détails les sources d’un passé dont aujourd’hui les derniers témoins disparaissent.

Certes, la froideur du livre, cette litanie morbide, donnent une idée très précise du caractère industriel et rationnel du génocide. Tout ceci dessine un étonnant aperçu d’une culture du génocide, y compris dans sa dimension matérielle (les bâtiments, les objets…etc). Il demeure cependant une impression curieuse : l’auteur a fait le choix d’une pure et simple description des sources, alors qu’elle aurait pu être suivie d’une analyse épistémologique d’historien, d’une réflexion philosophique sur le rapport de l’historien à ses sources, sur la construction d’une entreprise historique particulièrement délicate. Nul doute que Raul Hilberg était le plus qualifié des historiens pour écrire ce livre. Peut-être le fera-t-il dans un prochain opus. Cet ouvrage très marqué par sa construction anglo-saxonne se termine sans conclusion. Il laisse ainsi un double sentiment, d’admiration face à l’ampleur de la tâche entreprise et d’inachevé.

Sébastien Laurent
( Mis en ligne le 19/10/2001 )
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