L'actualité du livre
Histoire & Sciences socialeset Science Politique  

Dictionnaire historique de la vie politique française au XXe siècle
de Jean-François Sirinelli et collectif
PUF - Quadrige 2003 /  30 €- 196.5  ffr. / 1254 pages
ISBN : 2-13-052513-X
FORMAT : 15x20 cm

L'auteur du compte-rendu : Agrégée d’histoire, Claire Blandin a soutenu, en 2002, une thèse de doctorat sur Le Figaro littéraire (1946-1971) à l’IEP de Paris. Elle enseigne l’histoire des médias dans le Département de communication politique de l’Université Paris XII.

Le XXe siècle politique

Dictionnaire et ouvrage collectif d’universitaires, ce livre, dirigé par Jean-François Sirinelli, veut être, à la fois, un «instrument de travail et de culture». Son édition au format de poche, et au prix de 30€, le rend accessible aux bourses étudiantes, ou seulement curieuses du renouveau historiographique sur le siècle passé. Dans un paysage éditorial qui prise la forme du dictionnaire, sans en respecter parfois la construction, l’ouvrage fait le choix d’entrée biographiques et événementielles classiques. Fruit de la nouvelle vigueur de l’histoire politique française, il n’adopte pas une démarche épistémologique, mais montre les nouveaux outils en action, dans le renouvellement des notices.

Le Dictionnaire historique de la vie politique française au XXe siècle interroge l’ensemble de la société française dans ses rapports au politique : les médias (articles sur le secteur audiovisuel, sur les journaux), les événements (mai 68), les modalités de l’engagement politique («manifestation»)… L’omniprésence de ce questionnement politique est perceptible dans certains intitulés : sous le titre «Révolution française dans le débat politique», Claire Andrieu propose neuf pages de synthèse sur la place de la Révolution dans les débats politiques du siècle. Le plus souvent, les termes des entrées sont ceux qui ont impressionnés l’imaginaire collectif («Métro Charonne»). De fait, c’est une histoire incarnée qui prend forme, celle des hommes et de leurs engagements : le dictionnaire ne propose pas un exposé des théories autour de l’environnement, mais un article «écologistes» retraçant le parcours des mouvements. C’est aussi ce qui explique la place prise par les intellectuels dans les entrées biographiques, qu’ils aient eu un engagement partisan (Louis Aragon) ou non (Albert Camus). Les intitulés de théorie politique (Tony Judt évoque le marxisme) pistent la destinée des idées dans l’histoire de France du XXe siècle.

Toutes les notices comprennent une bibliographie, qui veut, elle aussi, répondre à la double vocation du dictionnaire. A côté des ouvrages de synthèse, les sources de première main sont donc présentées. Ces bibliographies sont construites (celle de l’Action française mentionne les ouvrages contemporains du mouvement, les livres récents et ceux portant sur sa destinée) et critiques (Sylvie Guillaume souligne l’absence d’ouvrage sur Le Figaro). Lorsque l’article développe un angle novateur, ces bibliographies peuvent être développées (Bertrand Hervieu en propose une de deux pages sur «Les paysans»).

Certains articles proposent, en effet, des synthèses nouvelles (comme sur le rôle des «conférences de presse» dans la communication politique). Le dictionnaire offre alors une relative souplesse de forme (l’article sur Alain Savary propose une chronologie) et les notices peuvent atteindre neuf pages, lorsque les hommes politiques n’ont pas encore trouvé leur biographe (Jacques Chaban-Delmas, Edgar Faure ou Guy Mollet). C’est cette liberté qui permet aux auteurs-chercheurs de présenter des textes pédagogiques (Jacques Marseille illustre son propos de nombreux tableaux, les plans des articles longs apparaissent dans des inter-titres) et novateurs (la décolonisation est envisagée dans une perspective comparatiste entre les grands empires).

Car cette réédition est aussi une actualisation du dictionnaire, paru pour la première fois en 1995. Elle signale la place des acteurs des dernières législatures (entrée de Robert Hue ou Jean-Pierre Raffarin), et les nouveaux termes du débat politique («mondialisation»). Au jeu des rares coquilles, on remarque, dans ce domaine, que Georges Marchais «reste membre du comité central». Plus sérieusement, on observe que l’historien, s’il manque de recul par rapport au très contemporain, peut le placer sous le regard des événements plus anciens («élections présidentielles de 2002»). L’ouvrage signale, enfin, les derniers apports de l’historiographie : Sabine Jansen évoque sa thèse sur Pierre Cot, un nouvel article sur «Le Point» évoque les recherches en cours de Véronique Odul.

Les personnalités de ces deux derniers auteurs permettent de souligner la diversité, la très grande compétence, et le renouvellement des 102 collaborateurs de cet ouvrage. Leur travail commun donne une nouvelle jeunesse à cet indispensable outil d’appréhension du paysage politique contemporain.

Claire Blandin
( Mis en ligne le 10/11/2003 )
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