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Histoire & Sciences socialeset Témoignages et Sources Historiques  

Correspondance générale - Volume 5 - Boulogne, Trafalgar, Austerlitz, 1805
de Napoléon Bonaparte et Collectif
Fayard Fondation Napoléon 2008 /  52 €- 340.6  ffr. / 1128 pages
ISBN : 978-2-213-63721-1
FORMAT : 16cm x 24cm

Préface de Martine de Boisdeffre.

L'auteur du compte rendu : Archiviste-paléographe, docteur de l'université de Paris I-Sorbonne, conservateur en chef du patrimoine, Thierry Sarmant est adjoint au directeur du département des monnaies, médailles et antiques de la Bibliothèque nationale de France. Il a publié Les Demeures du Soleil, Louis XIV, Louvois et la surintendance des Bâtiments du roi (2003), Vauban: l'intelligence du territoire (2006, en collaboration), Les Ministres de la Guerre, 1570-1792 : histoire et dictionnaire biographique (2007, dir.).


Le vrai portrait de Napoléon

La publication de la Correspondance générale de Napoléon, commencée en 2004, se poursuit au rythme rapide d’un volume par an. Ce tome V comprend les lettres écrites ou dictées par l’empereur pendant l’année 1805 : 1764 missives, dont plus du tiers sont inédites !

Cette source exceptionnelle apporte nombre de précisions sur les grands événements de 1805 : camp de Boulogne, création du royaume d’Italie, bataille de Trafalgar, lutte victorieuse contre la troisième coalition, qui se conclut par la bataille d’Austerlitz, le 2 décembre 1805, un an exactement après le sacre de Napoléon à Notre-Dame.

Mais, au-delà d’une histoire politique et militaire dont le déroulement est bien connu, cette correspondance offre surtout un extraordinaire portrait sur le vif de son auteur. Napoléon écrit à son épouse, aux membres de sa famille, à ses ministres et à ses généraux. D’une lettre à la suivante, on passe sans transition de la grande stratégie européenne à la police des théâtres ou aux odeurs de peinture dans les palais impériaux, de l'infiniment grand à l’infiniment petit. Boulimique d’information, l’empereur a la passion du détail : en cela, il n’est pas différent de son grand prédécesseur Louis XIV, ou d’autres dirigeants de la France et du monde.

La vraie singularité de Napoléon est dans son style volontiers cinglant, voire brutal. A Fouché : «Pas d’amphigouri (…) votre ministère n’est point organisé ; les principaux de vos bureaux n’ont aucune règle» (1er mars). A Moncey : «Les soldats ne doivent jamais être témoins de la discussion des chefs» (31 mars). A Cretet : «Votre ingénieur de Troyes est un homme médiocre ; celui de Mâcon est encore plus mauvais ; il ne sait rien du tout» (10 avril). A Cambacérès : «Le Piémont est organisé d’une manière absurde» (21 mai). Au prince Eugène : «Parlez le moins possible ; vous n’êtes pas assez instruit et votre éducation n’a pas été assez soignée pour que vous puissiez vous livrer à des discussions d’abandon» (7 juin). A Joseph : «La paix est un mot vide de sens ; c’est une paix glorieuse qu’il nous faut» (13 décembre).

«Quel dommage qu’un si grand homme soit si mal élevé», dira bientôt de son maître le prince de Talleyrand. En 1805, Napoléon a déjà tout du mégalomane que l’on aime à dénoncer quand on parle des dernières années de l’Empire, mais c’est un mégalomane doté des moyens intellectuels de sa folie des grandeurs.

Ajoutons qu’à l’édition de la correspondance, les directeurs de la publication ont annexé de riches études qui viennent l’éclairer : sur la politique italienne de Napoléon en 1805 (Alain Pillepich), sur les archives du Cabinet de Napoléon et de la secrétairerie d’État (Jean-Baptiste Auzel), sur le baron de Méneval (Marc Allégret), sur le camp de Boulogne (Fernand Beaucour), sur la Grande Armée de 1805 (Gabriel Madec), sur la stratégie maritime de Napoléon en 1805 (Rémi Monaque). Des tables des poids et mesures, des cartes, une chronologie et des index viennent faciliter la consultation des lettres de l’empereur.

Pour comprendre Napoléon, rien ne vaut la lecture de cette correspondance générale, qui doit trouver sa place, au-delà des milieux universitaires ou érudits, dans la bibliothèque de tout amateur de l’histoire de France.

Thierry Sarmant
( Mis en ligne le 02/12/2008 )
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