L'actualité du livre
Histoire & Sciences socialeset Témoignages et Sources Historiques  

Agent secret de Churchill
de Bob Maloubier
Tallandier 2011 /  19,90 €- 130.35  ffr. / 258 pages
ISBN : 978-2-84734-795-1
FORMAT : 14,5cm x 21,5cm

Jean-Louis Crémieux-Brilhac (Préfacier)

L'auteur du compte rendu : Alexis Fourmont a étudié les sciences politiques des deux côtés du Rhin.


L'homme du SOE

«Je n’ai rien d’autre à offrir que du sang, de la peine, de la sueur et des larmes ! Vous me demandez ce qu’est notre politique ? Je vous dirai : c’est de faire la guerre, sur mer, sur terre et dans les airs, de toute notre puissance, et avec toute la force que Dieu pourra nous donner ; de faire la guerre contre la monstrueuse tyrannie, sans égale dans le sombre et lamentable registre des crimes de l’humanité. Telle est notre politique. Vous me demandez ce qu’est notre but ? Je vous répondrai d’un mot : la victoire ! La victoire à tout prix, la victoire en dépit de toutes les terreurs, la victoire, si long et difficile que puisse être le chemin ; car sans victoire, il n’est pas de survie. (…) En cet instant, je me sens en droit de demander l’aide de tous, et je vous dis : venez donc, unissons nos forces, et marchons tous ensemble».

Assurément, ces propos sont célèbres. Mieux, ils sont historiques ! En mai 1940 à la Chambre des Communes, c’est par leur biais que Sir Winston Churchill annonça sa détermination à faire la guerre à l’Allemagne nazie. Il n’espérait rien d’autre que défaire ceux qu’il appelait les «Huns», dont les vagues successives submergèrent de larges pans du «Vieux Continent». Pour ce faire, dès l’été 1940, le Premier ministre britannique suscita la création du SOE, c’est-à-dire du Special Operations Executive. Visant à «mettre l’Europe en feu», ce service d’action clandestine comprit dans ses rangs nombre de Français désireux de poursuivre le combat contre les Allemands. Ce fut le cas de Bob Maloubier, dont les mémoires viennent de faire l’objet d’une publication de la part des éditions Tallandier.

L’intérêt de cette publication est majeur. En effet, comme l’indique d’emblée le préfacier Jean-Louis Crémieux-Brilhac, «ce livre tranche sur tous les mémoires de résistants publiés à ce jour à la fois par la personnalité haute en couleurs de Bob Maloubier, par les exploits et les péripéties de guerre singulières qu’il relate et par une écriture qui emporte le lecteur à bride abattue». Méconnu, le SOE au sein duquel Bob Maloubier œuvra si efficacement fut une force essentielle de la Résistance. Jusqu’à la Libération, ce service fournit leur logistique aux services secrets de la France Libre, forma leurs agents, assura leur parachutage, les dota de postes émetteurs, régit leurs liaisons radio et concourut plus largement à l’armement des Résistants.

Dans le cadre des activités clandestines du SOE, Bob Maloubier fut notamment parachuté en France dans la nuit du 15 au 16 août 1943. Le jeune homme avait alors pour mission d’apporter ses talents de saboteur et d’instructeur de sabotage au réseau local du SOE Salesman, qui était actif en Haute-Normandie, entre Rouen et Le Havre. L’époque était particulièrement trouble. Suite aux arrestations du général Delestraint, puis de Jean Moulin, les Anglais estimaient en effet que le potentiel militaire de la Résistance avait été amputé de 80%. A un an d’un possible débarquement en France, la situation ne laissait d’effrayer les Alliés. Il était donc absolument vital de procéder à la remilitarisation de l’action résistante et de donner aux rebelles les moyens de harceler la machine de guerre allemande.

Au fil des pages, Bob Maloubier retranscrit avec style ses souvenirs de guerre, et ce des errements d’Alger aux maquis de Corrèze en passant par Londres. Avec cet ouvrage haletant et passionnant, le lecteur est donc invité à suivre les multiples étapes de la trajectoire hors du commun d’un lycéen aventureux et outré par l’armistice de 1940, qui devint pendant la Deuxième Guerre mondiale «un dur à cuire, baroudeur à tous crins et baroudeur pour la vie». Bob Maloubier «déroule [ici] la saga de la Résistance comme une grande aventure où le courage est une banalité, où les acteurs se bousculent et où les faits se court-circuitent».

Alexis Fourmont
( Mis en ligne le 13/09/2011 )
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