Histoire & Sciences sociales
Dossiers thématiques Présentation par Natalie Petiteau, professeur d'histoire contemporaine à l'Université de Poitiers et historienne de la société du XIXe siècle et de la portée des années napoléoniennes. Elle a notamment publié Napoléon, de la mythologie à l'histoire (Seuil, 1999) et Lendemains d'Empire: les soldats de Napoléon dans la France du XIXe siècle (Boutique de l'histoire, 2003).
Elle est par ailleurs responsable éditorial du site http://www.calenda.org.
Napoléon : 2 siècles et 10 ans d'histoire
Le bicentenaire du couronnement de Napoléon a donné lieu à une profusion d’ouvrages qui révèlent étrangement que, concernant les années 1799-1815, c’est l’établissement de l’Empire qui apparaît commémorable, alors que la presse a boudé ce qui, scientifiquement, a pu se faire depuis 1999. Ce paysage éditorial si agité est-il pour autant fruit de nouveautés historiographiques ?
En fait, ce bicentenaire est marqué par des biographies venant de l’étranger, celle de Luigi Mascilli Migliorini et celle de Steven Englund, mais si les regards changent quelque peu, les connaissances ne sont pas renouvelées. Car bien rares sont les ouvrages qui sont fondés sur la lecture de sources nouvelles et nombreux sont en revanche ceux qui reviennent sur des sujets déjà traités, ainsi sur le couronnement, avec le travail de David Chanteranne, ou sur la mythologie, avec le dernier livre d’Annie Jourdan. C’est en fait du côté des œuvres collectives que les apports sont réels, tant avec le Napoléon, le monde et les Anglais d’Annie Jourdan, Alan Forrest et Jean-Paul Bertaud, qu’avec L’Empire des muses dirigé par Jean-Claude Bonnet. C’est aussi du côté des publications antérieures, hors du bicentenaire, que le lecteur devra en fait se ressourcer, par exemple en lisant l’analyse de Didier Le Gall sur le Mémorial de Sainte-Hélène.
Finalement, le bicentenaire n’a jusqu’ici été que prétexte à relectures ou même simples réécritures, et occasion pour les auteurs de se livrer à l’exercice qui en a fasciné tant d’autres avant eux : celui de se confronter à un personnage que tous jugent hors pair, façon de se comprendre eux-mêmes, mais aussi de nous aider à saisir ce que les passions générées par Napoléon nous apprennent sur notre propre société.
Reste que, pour accomplir notre travail d’historien en posant au passé les questions suscitées par l’observation du présent, nous avons sans doute plus besoin d’en savoir tout de même davantage sur ce passé plutôt que de toujours réécrire les mêmes pages d’histoire. Car pour l’heure, il reste à craindre que le bicentenaire continue de ne susciter d’intérêt que pour des biographies ou des synthèses plus ou moins ambitieuses, sans jamais générer de renouvellements véritables dans cette historiographie.
Natalie Petiteau
( Mis en ligne le 24/01/2005 )
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