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L'Humanité disparaîtra, bon débarras !
de Yves Paccalet
Arthaud 2006 /  15 €- 98.25  ffr. / 198 pages
ISBN : 2-7003-9665-0
FORMAT : 13,0cm x 20,0cm

L’auteur du compte rendu : Rémi Luglia, professeur agrégé d’Histoire et interrogateur en deuxième année dans une classe préparatoire commerciale, est doctorant à Sciences-Po Paris où il mène une recherche sur l’histoire de la protection de la nature en France de 1854 à nos jours à travers le mouvement associatif.

L’humanité vue en noir

Nous connaissons Yves Paccalet pour ses nombreux livres sur la nature, ses beautés et sa fragilité. Le dernier paru, Forêts de légende allie dans un kaléidoscope chatoyant textes et belles images et retranscrit les délicates et subtiles émotions qui découlent de l’observation de la nature. Ici, rien de tout cela. Yves Paccalet nous livre un surprenant essai à la fois désopilant et terriblement désespérant.

S’il a consacré l’essentiel de son temps et de ses activités à l’information, à la sensibilisation en matière de nature et d’environnement, l'auteur avoue ne plus croire à une transformation du comportement des hommes, et ce depuis déjà longtemps. Avec cet ouvrage, il déchire le voile et nous livre tels quels ses sentiments réels et surtout son analyse de la situation actuelle sans plus prendre de gants, au risque de passer pour un écologiste catastrophiste. Au contraire, il revendique maintenant le statut de Cassandre : prêtresse de Troie à laquelle les Dieux ont donné le pouvoir de prévoir les malheurs mais que les hommes refuseront toujours de croire. Car ces vérités les dérangent. Mais laissez-nous détruire en paix ! Pourquoi donc avons-nous mis des œillères ? Pour ne pas voir les conséquences logiques de nos actions. C’est la définition même de l’irresponsabilité humaine.

En maniant avec une jubilatoire dextérité une ironie féroce et mordante mais ô combien juste et perspicace, Yves Paccalet nous offre, bruts de décoffrage, ses constats et ses analyses sur la situation de notre planète et du vivant. La part de la responsabilité humaine dans l’évolution actuelle est majeure. Elle s’explique par le triptyque qui guide les actions humaines : sexe, territoire, hiérarchie. Autrement dit, reproduction, possession, domination. Rares sont les hommes qui sont capables de s’affranchir de ses désirs insatiables. Yves Paccalet n’en connaît pas, nous non plus. Et nous touchons à un point particulièrement agréable du livre : l’auteur n’entend pas donner de leçons aux autres humains, il se place au contraire parmi l’humanité… avec tous ses travers. Il se livre ainsi à quelques savoureuses pages d’introspection et d’autocritique. On apprécie particulièrement le moment où, après avoir vertement tancé une humanité qualifiée de «lapinique» ou «lapinesque» (car elle fornique et se reproduit comme les lapins), il nous explique pourquoi et comment lui-même a fini par contribuer à l’explosion démographique planétaire.

On l’a compris, Yves Paccalet avoue désormais sa lucidité et donc sa désespérance : nul espoir ne réside dans l’homme qui s’avère incapable de changer, de s’adapter finalement à la situation qu’il est en train de créer. Malgré d’indéniables qualités humoristiques qui font qu’il est très agréable à lire, cet ouvrage touche néanmoins nos consciences en ce sens qu’il met clairement le doigt sur ce qui fait mal. Et ce n’est pas la faute à Bush ou à Total. Non : chacun d’entre nous est responsable. Nous avons tous choisi la fuite en avant vers l'auto-annihilation. Incapables de nous dominer, de nous réguler, égoïstes, individualistes forcenés, cédant sans vergogne et nous laissant tous diriger par la reproduction-possession-domination, nous nous condamnons nous-mêmes… Ainsi, si l’on a de quoi rire, on a aussi largement de quoi pleurer à la lecture de cet ouvrage par ailleurs très bien écrit, de manière simple, intelligible et démonstrative.

Finalement, Yves Paccalet ne juge pas vraiment dramatique une éventuelle disparition de l’homme : la Terre survivra, elle. Et la vie aussi, ne serait-ce que sous la forme de cafards et de scorpions (ils résistent aux radiations et aux pollutions extrêmes, eux) ou de bactéries et de protozoaires. Quelques millions d’années d’évolution et la Terre connaîtra de nouveau un feu d’artifice du vivant ! Sans nous…

Rémi Luglia
( Mis en ligne le 17/07/2006 )
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