L'actualité du livre
Filmset Drame  


Son frère
de Patrice Chéreau
avec Bruno Todeschini, Eric Caravaca, Maurice Garrel, Nathalie Boutefeu
Arte Vidéo 2004 /  3.82 € - 25 ffr.
Durée DVD 150 mn.
Durée film 87 mn.
Classification : Tous publics
Sortie Cinéma : 2003, France

Version : Version originale française
Format vidéo : 16/9 compatible 4/3
Format audio : DTS 5.1, Dolby 5.1

Un prix : Ours d’argent meilleur réalisateur Berlin 2003.

Bonus
Film commenté par Patrice Chéreau
Entretiens inédits avec Patrice Chéreau, Eric Caravaca, Bruno Todeschini, Anne-Louise Trividic et François Gedigier (décembre 2003 – 35 mn)
Diaporama des photos d’Eric Caravaca
Scènes coupées au montage, commentées par le réalisateur
Filmographie en images avec trois bandes annonces de films de Patrice Chéreau.



La chair est triste, disait le poète. Mais elle est belle aussi, beauté dans la tristesse, que l’on dira mélancolique, et pour laquelle Patrice Chéreau, ici encore, montre une fascination d’artiste. Si Cronenberg est le cinéaste des entrailles, en France, Patrice Chéreau est celui des corps perdus, qu’il filme en amoureux, nus, bruts et fragiles, plastiques agressées par le temps qui passe, les violences de l’histoire (La Reine Margot), l’amour sauvage (Intimité) et la maladie, ici. Rien de plus matériel et à la fois de plus métaphysique que ces corps humains, tremplins d’une transcendance ; on pense au Christ et l’on ne s’étonne alors pas que les deux héros ici dépeints (car il y a de la peinture dans l’art de Chéreau, du Mantegna, du primitif flamand…), aient la trentaine…

A l’occasion de la maladie de l’aîné, Luc et Thomas se retrouvent. Thomas ne produit plus de plaquettes et appelle au secours, ou plutôt prend en otage dans sa maladie, son cadet, perdu de vue la faute au temps et aux malentendus, une homosexualité que le jeune frère n’assumait pas face à son aîné, à moins que ce ne soit l’inverse. Son frère est l’histoire d’une maladie mettant en scène des êtres à la fois proches et séparés, et la déchéance d’un homme à qui sa maladie ôte le goût du combat, la force de vivre. On suit avec délice mais aussi douleur cet accompagnement d’un homme au chevet de son frère, les silences qui les unissent, entre connivence et incompréhension, les mimiques et les traits physiques signant la fraternité, la santé de l’un et la faiblesse de l’autre.

Adapté du roman éponyme de Philippe Besson, Son frère est un film serein et apaisant pour ce qu’il a de dur. Parce que, dans ce no-man’s-land de l’agonie, est offerte l’occasion de retrouvailles, de règlements de comptes, et d’une réconciliation. Le film offre cela, l’histoire étant remarquablement servie par les jeux de deux acteurs époustouflants : Bruno Todeschini, ici proprement révélé et dont on salue la prouesse physique qui a consisté à perdre énormément de poids (12 kilos) pour signifier la maladie sans la singer jamais ; et Eric Caravaca, touchant de bout en bout. Remarquable aussi, la justesse dans l’évocation de la maladie, dite en version originale par un personnel hospitalier mis en scène dans son environnement «naturel», et une précision quasi documentaire. Chéreau y ajoute son savoir faire, des scènes que l’on n’oubliera pas : le rasage du malade sur le point d’être opéré, la colère d’un père que le mal de son fils désempare et cet art dans la figuration des corps, leur incommunicabilité, leur beauté et la maladie au travail ; la maigreur de la maladie, sa nudité, l’humiliation d’un corps qui lâche, les sutures, les perfs et les drains ; la solitude de la maladie… Le tout dans des tons bleus, presque glauques, aquatiques, corrigés par endroit par des éclats écarlates, le rouge du sang, celui de la vie, de l’amour...
Comme dans le roman, le récit alterne les scènes hivernales à l’hôpital et celles d’un été breton, en maison de vacances où Thomas, opéré et amoindri, accompagné par Luc, finit par choisir la défaite… Ces allers et retours créent un dialogue entre les situations, des moments qui se répondent, se font écho…

Tourné assez rapidement avec une équipe réduite, Son frère est un petit bijou cinématographique, diffusé l’an dernier sur Arte avant sa sortie sur grand écran, récompensé à Berlin, aujourd’hui sur support DVD. La maquette y est superbe, sobre comme le film, et les bonus nombreux et riches : le film commenté par le réalisateur, des entretiens, des scènes coupées, des photos et des bandes annonces des derniers films du cinéaste (Ceux qui m’aiment prendront le train, La Reine Margot et Intimité) en font un objet à acquérir d’urgence pour enrichir sa DVDthèque.


Bruno Portesi
( Mis en ligne le 03/05/2004 )
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