L'actualité du livre
Filmset Fantastique / Science-Fiction  


Solaris
de Steven Soderbergh
avec George Clooney, Jeremy Davies, Natascha McHelhone, Viola Davis
Fox Pathé Europa 2003 /  2.6 € - 17 ffr.
Durée film 95 mn.
Classification : - 12 ans
Bonus :

Commentaires audio de James Cameron avec le réalisateur
Bande-annonce
Solaris : la face cachée de Solaris
Le script intégral en galeries de photos
Menus animés

Version : DVD Zone 2/PAL
Format vidéo : 2.35
Format image : 16/9 compatible 4/3
Format audio : Français, anglais, italien (Dolby Digital 5.1), anglais (Dolby Digital 5.1)
Sous-titres : Français, Anglais, Italien, Néerlandais



Steven Soderbergh est un cinéaste à part dans le paysage cinématographique américain. Cela transparaît dès son premier film Sexe, mensonges et vidéo (Palme d’or à Cannes en 1989) où il adopte le ton personnel propre au cinéma américain indépendant nourri d’influences européennes. Ce film annonce d’emblée un univers singulier, précédant ainsi des œuvres comme Kafka (1992) ou Schizopolis (1996). Cela aurait pu le placer en marge du système hollywoodien, mais, contre toute attente, Soderbergh y fait régulièrement des incursions pour en tirer le meilleur. Il exploite en effet habilement l’aura populaire dont bénéficient des acteurs comme Julia Roberts ou George Clooney dans Erin Brockovich (2000) et Ocean’s eleven (2002) ou encore celle du couple Michael Douglas/Catherine Zeta-Jones dans Traffic (2001). Ainsi, en jouant avec leur image, parvient-il à sublimer leur jeu d’acteur dans des films qui évitent l’écueil d’un cinéma formaté et sans surprise. En somme, au regard de sa filmographie, on peut avancer que Soderbergh réussit le pari de réunir et de réconcilier deux cinémas réputés frères ennemis et parvient ainsi à enterrer le vieux débat stérile qui oppose de façon manichéenne le cinéma commercial au cinéma d’auteur. Quant à Solaris, il constitue un tournant dans le travail du réalisateur puisqu’il s’agit de son premier film de science fiction.

Chris Kelvin (George Clooney), un psychologue, est envoyé en mission sur Prométhée, une station orbitale à proximité de la planète Solaris. D’étranges phénomènes ont lieu sur la station et les membres de l’équipage présents ne souhaitent pas revenir sur Terre. Kelvin a pour mission d’étudier cette situation inhabituelle et de convaincre l’équipage de repartir sur Terre. Mais il va lui-même se retrouver confronté à d’étranges faits.

A partir de cette trame apparemment classique dans le genre de la science-fiction, Soderbergh va décliner des thèmes autour de la nature humaine, du couple, mêlée d’une réflexion métaphysique et d’une mise en question de la notion de réalité. Cette dernière va être bousculée notamment dans la scène de thérapie de groupe du docteur Kelvin, au début du film. Les patients témoignent de leur rapport à l’image comme d’un élément déterminant dans leur rapport même au réel. Certains surinvestissent les images de façon démesurée, d’autres au contraire les désinvestissent totalement, leur ôtent toute signification au point de ne plus les ressentir comme réelles. Cette idée de confusion entre réel et fantasme va contaminer tout le film. La scène de thérapie va en fait structurer toute la pensée de l’œuvre. On retrouvera ce diptyque réel/fantasmé avec les membres de l’équipage, qui devront faire face aux manifestations de leur inconscient, c’est-à-dire de leurs propres images mentales. On le retrouvera également à travers les interrogations de Soderbergh sur le couple et sa difficulté à faire coïncider réalité et fantasme, à faire se rencontrer l’autre tel qu’on se le représente, tel qu’on voudrait qu’il soit et l’autre tel qu’il est. Ce thème nous ramène à Sexes, mensonges et vidéo et plus récemment à Mulholland Drive de David Lynch.

La musique lancinante de Cliff Martinez contribue beaucoup à donner au film sa dimension hypnotique, soulignée par une mise en scène fluide, comme en apesanteur. Ce savant dosage qui oscille entre réalité et fantasme constitue un équilibre parfaitement maîtrisé par Soderbergh. L’interprétation ne connait pas de fausse note, des seconds rôles parfaits à Clooney qui nous montre un autre visage en abordant un registre à mille lieues de ses rôles habituels de séducteur. Plutôt synthétiques dans les dialogues et partisans de l’ellipse, les personnages nous donnent pourtant l’impression de dire l’essentiel. Au spectateur de répondre à leur questionnement, de se faire sa propre opinion sur ce que représente la planète Solaris. Le rythme du film nous invite donc en permanence à produire nos propres réponses.

Enfin, les accents métaphysiques du film font immanquablement penser à 2001, odyssée de l’espace de Kubrick, figure tutélaire dont les influences sont évidentes. Pourtant Solaris, qui crée sa propre dynamique et impose une vision personnelle, transcende aussi le genre et pose des jalons dans l’histoire du cinéma. Les deux films semblent ainsi constituer les deux astres en attraction d’une galaxie à part dans le monde de la science-fiction.

A propos des bonus, en supplément de la bande annonce du film en version originale, on peut voir les coulisses du tournage. Le réalisateur, les producteurs et les acteurs se succèdent pour parler de la construction du film. Mais face à la richesse de celui-ci, cela paraît bien maigre... Pour ceux qui n’auraient pas vu la version de Tarkovski, le scénario original, d’après le roman de Stanislaw Lem, est présenté en intégralité. Il diffère peu de celui de Soderbergh à ceci près qu’il donne un relief plus spirituel au film en évoquant davantage la question de l’existence de Dieu. Un regret tout de même : le distributeur francais n’a pas jugé utile de traduire le scénario, ce qui le destine de fait aux seuls anglophones.


Tiphaine Rocherevil
( Mis en ligne le 02/03/2004 )
Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024



www.parutions.com

(fermer cette fenêtre)