L'actualité du livre
Animation / manga  


Memories
de Katsuhiro Otomo
Gaumont Columbia Tristar Home Vidéo 2004 /  3.66 € - 24 ffr.
Durée film 113 mn.
Classification : Tous publics
Sortie Cinéma : Japon, 1995

Version : DVD 9 / Zone 2
Format image : 16/9 compatible 4/3, format d'origine respecté 1.85
Format audio : français et japonais, Dolby digital 5.1
Sous-titres : français, anglais, arabe, danois, norvégien, suédois

Bonus :
Documentaire, Memories of Memories
Bandes annonces




Sept ans après le phénoménal Akira, Katsuhiro Otomo, l’un des très grands noms de l’animation japonaise et mondiale, sortait Memories, compilation de trois moyens métrages écrits et supervisés par lui, et réalisés avec deux animateurs complices : Koji Morimoto et Tensai Okamura. On ne peut que se réjouir que sorte enfin en France, directement sur support DVD (quid du grand écran ?!), ce travail où l’onirisme et la gravité des sujets traités s’allient à un sens surprenant de la perfection.
Beauté de l’image et profondeur du propos, fluidité de l’animation, recherches graphiques (surtout dans le surprenant «Chair à canon»), et ambiances musicales étoffées font en effet de chacun de ces trois films un régal.
«La Rose magnétique» renvoie au Kubrik de 2001. Des éboueurs de l’espace, ferrailleurs interstellaires, interceptent un message de détresse provenant d’une zone prise dans un mystérieux champ électromagnétique : Madame Butterfly de Puccini... Deux acolytes se dévouent pour aller sauver l’auteur du message. En plein no-man’s-land galactique, ils pénètrent dans l’univers charmeur et fantomatique d’une cantatrice d’un autre temps : marbre et stuc, ambiances aristocratiques très XIXe siècle, enferrés dans des masses de tôles mortes. Rêve ou réalité ? Les deux hommes finissent envoûtés par la dame à la rose, et rejoignent ses souvenirs piégés sur puce électronique…

«La Bombe puante» narre les aventures tragi-comiques d’un employé ayant ingurgité par inadvertance une pilule expérimentale, moins destinée à soigner son rhume comme il le pense, qu’à servir d’arme de destruction massive élaborée avec l’argent Yankee. Emane de lui une odeur pestilentielle qui accélère la floraison des arbres et autres végétaux, mais tue tout autre être vivant à la ronde… Graphiquement et dans l’esprit, cet opus rappelle Roujin Z, autre long métrage d’Otomo, qui s’attaquait à une autre angoisse des sociétés post-modernes, et en particulier japonaise : le vieillissement de la population, sous fond de prouesses technologiques jamais parfaitement maîtrisées. Ici, la peur terroriste, et l’écho de l’attentat au gaz Sarin.

Enfin, «Chair à Canon», sans doute l’œuvre la plus originale et la plus poétique des trois, déroule la journée banale d’un petit garçon dans une ville tout entière dévolue à un effort de guerre quotidien. La structure sociale pyramidale se reflète dans l’architecture même d’une ville tout en hauteur et dont le militarisme outrancier apparaît dans une forêt de canons émergeant des toits…

On peut trouver comme trait d’union à ces trois films par ailleurs très dissemblables des questionnements analogues. Sur la mémoire, justement, le devoir de mémoire comme celui d’oubli : les trois récits ne parlent-ils pas de fantômes, plus ou moins contemporains, plus ou moins graves, personnels ou collectifs ? Des thèmes propres à Otomo innervent l’ensemble : une vision pessimiste ou désabusée de la condition humaine, alimentée par le constat d’une histoire décidément tragique, une méfiance mêlée de fascination, celle d’un homme apprenti sorcier, vis-à-vis du machinisme et de la modernité, et un doigt accusateur levé contre tout pouvoir mégalomaniaque et des bureaucraties pléthoriques autant qu’inefficaces : voir en l’occurrence Akira et le tout aussi fascinant Metropolis auquel Otomo participa.

Voici donc un DVD (ici agrémenté d’un court documentaire et de bandes annonces) à ranger aux côtés des œuvres du maître, et d’autres joyaux de l’animation nippone: Ghost in the Shell, Perfect Blue, les classiques des studios Ghibli, etc. Prochaine étape pour Otomo : Steamboy, long métrage qui sortira sur nos écrans en septembre prochain.


Bruno Portesi
( Mis en ligne le 30/08/2004 )
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