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Le bien dans les fissures du mal…
Kim Thúy   Em
Liana Levi 2021 /  15 € - 98.25 ffr. / 144 pages
ISBN : 979-10-349-0380-1
FORMAT : 14,0 cm × 21,0 cm
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Kim Thúy, née en 1968 au Vietnam, a quitté son pays en 1975 comme boat people ; installée aujourd’hui au Québec, elle y a exercé divers métiers avant d’écrire. Son premier livre, Ru (2010), est devenu un best seller. Em est son quatrième roman. En exergue, l’auteure explique le titre : «Le mot em existe en premier lieu pour désigner le petit frère ou la petite soeur dans une famille ; ou le plus jeune, ou la plus jeune, de deux ami(e)s ; ou la femme dans un couple. J’aime croire que le mot em est l’homonyme du verbe «aimer» en français, à l’impératif : aime. Aime. Aimons. Aimez».

Et c’est la réussite de ce court roman, presque une longue nouvelle, que de narrer à la fois l’histoire terrible des drames vécus par les Vietnamiens et de laisser place à l’histoire d’amours possibles. Une histoire terrible, celle de la colonisation, du sort des coolies travailleurs dans les plantations d’hévéas indochinoises, de la guerre que nous appelons «guerre du Vietnam» mais qui au pays se nomme «guerre américaine». La destruction systématique, les pulvérisations d’agent orange qui brûle toute végétation, les massacres. «Quelle était la température de l’eau quand M.Út a été jeté au fond du puits avant d’y être brûlé vivant au lance-flammes par le sergent Peter ?». Le massacre de My Lai, extermination systématique de tout un village, devenu symbole de cette guerre. Puis la fin de la guerre, le départ en hâte des Américains, la chute de Saïgon…

Mais, nous dit l’auteure : «Dans toute zone de conflit, le bien se faufile et trouve une place jusque dans les fissures du mal». Et c’est aussi l’histoire de ce fragile bien qui est déroulée ici, et de l’étonnante résilience des survivants. Kim Thúy a choisi de construire son récit en déroulant de très courts chapitres, presque énigmatiques au début du roman. Un personnage, brutal, massif, émouvant cependant, Alexandre, le colon français ; un couple improbable qui se forme, Alexandre et Mai, la servante devenue compagne, leur enfant Tâm. Ainsi nait une famille, à laquelle s’adjoint la nourrice chargée de Tâm. Puis vient l’horreur, la guerre, le massacre de tous les habitants de la plantation, à l’exception de Tâm et de sa nourrice. La fuite, le retour à une vie semi normale à My Lai, le village de la nourrice, puis à Saïgon. Mais un jour, elles reviennent dans le village de My Lai pour une fête et leur destin bascule…

Pour dire la tragédie de cette guerre en partie oubliée aujourd’hui, Kim Thúy tisse avec une grande délicatesse une tapisserie dont elle entrecroise les fils ; chaque fil est une vie brisée définitivement ou non, une vision de la guerre, des souvenirs traumatiques, une formidable résilience fondée sur ce «bien», une interrogation sur ce qu’il reste actuellement dans les mémoires, sur les frontières indépassables, sur la formidable énergie des survivants. Les orphelins sont au coeur du récit, orphelins dont certains deviendront adultes, loin du pays de leur enfance, et pourront jouer de chance. C’est le cas de Louis et d’Em devenue Emma-Jade.

Laissons la conclusion à Kim Thúy : «En 2025, le 30 avril sera un mercredi, comme en 1975. Le cinquantième anniversaire sera certainement un grand événement pour tous les Vietnamiens. (…) Ce cinquantième anniversaire confirmera vraisemblablement que la mémoire est une faculté de l’oubli. Elle oublie que tous les Vietnamiens, peu importe où ils vivent, sont des descendants d’une histoire d’amour entre une femme de la race immortelle des fées et un homme du sang des dragons. (…) La mémoire (…) se souvient seulement des coups de poing, de la douleur profonde de ces coups qui ont meurtri les racines, cassé les liens ancestraux et brisé la famille des immortels».


Marie-Paule Caire
( Mis en ligne le 26/03/2021 )
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