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| Littérature -> Romans & Nouvelles |
| Nathalie Kuperman On était des poissons
Flammarion 2021 / 19 € - 124.45 ffr. / 268 pages
FORMAT : 13,7 cm × 20,9 cm
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A 11 ans, Agathe est retirée de l'école avant la fin de l’année et emmenée sur une plage de la Côte d'Azur par sa mère Alice, sans explication. Elle n'a pas le temps de dire au revoir à ses professeurs ou à ses amis et sa mère ignore tous les appels qu'elle reçoit du père d'Agathe. En se remémorant cet événement de son enfance, Agathe découvre et accepte des vérités déchirantes sur sa mère.
Agathe se souvient de sa mère comme aimante et belle. Son affection se manifeste à travers les petits noms attachants qu'elle donne à Agathe : «mon petit rat, mon macaroni, ma salamandre». À la plage, elles sont des poissons. Elles courent vers la mer et jouent avec les dauphins. Agathe et sa mère partagent des étreintes chaleureuses et réconfortantes, illustrant l'amour tendre qu'Alice porte à son enfant.
Cependant, à ces souvenirs agréables et oniriques sous le soleil s'entremêlent des moments marqués par la négligence et les critiques qu'Agathe ne comprend pas tout à fait dans son enfance. Alice dit à Agathe de se tenir droite et de ne pas manger trop, car cela la rendrait moins désirable. Elle fait sortir Agathe sans eau sous une chaleur étouffante et la gronde lorsqu'elle en trouve elle-même. Elle va même jusqu'à laisser Agathe seule sur la plage, toute la journée, ce qu'elle justifie en disant à Agathe qu'elle doit apprendre à se débrouiller seule dans ce monde.
Agathe avoue même qu'elle a du mal à utiliser le mot "maman" pour sa mère qui s'échappe souvent de son rôle parental. Alors que sa mère revient de longues nuits d'ivresse, elle devient méconnaissable pour Agathe. Lorsque sa mère est absente ou négligente, Agathe trouve refuge ailleurs. Elle trouve refuge dans la lecture de son livre, Le Bateau incassable, dont Kuperman parsème le récit d'extraits. Cette histoire dans l'histoire, qui décrit le temps perdu par une famille en mer, est l'échappatoire d'Agathe à l'étouffement oppressant que lui fait subir sa mère. Agathe trouve également refuge auprès de Séraphine, une femme de chambre muette de l'hôtel, qui l'aide à trouver le réconfort et la liberté après la tragédie.
Au fil de l'histoire, le lecteur comprend que l'instabilité d'Alice peut être attribuée, du moins en partie, au traumatisme qu'elle a subi dans son enfance lorsqu'elle a perdu sa mère et a dû être élevée par une grand-mère stricte. Kuperman raconte une histoire de traumatisme générationnel donc, un cycle destructeur auquel Agathe n'échappe qu'au prix d'une tragédie. Quand Alice est au mieux de sa forme, la plage est libératrice. Son amour pour Agathe est réconfortant. Mais quand elle est au plus mal, les rayons du soleil deviennent étouffants et suffocants.
La distinction que Kuperman crée entre l'environnement beau et chaleureux de la plage et la tempête émotionnelle qu'Alice affronte intérieurement (et dans laquelle Agathe est piégée) est déchirante. On est touché par l'amour irrésistible d'Alice, mais aussi tourmenté par la douleur et la peur qu'elle inflige à Agathe. Un récit édifiant sur ces traumatismes générationnels que vivent tant de personnes.
Zoe Howard
( Mis en ligne le 14/04/2021 )
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