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Fallait-il renaître ?
Michel Rio   La Remise au monde
Seuil 2002 /  13.44 € - 88.03 ffr. / 137 pages
ISBN : 2-02-050888-5
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Avec sa trilogie de romans inspirés par la légende arthurienne, son air discret et éloigné de l'agitation du monde - bien qu'il habite Saint-Germain-des-Prés -, Michel Rio fait un peu figure d'écrivain à part dans le cénacle littéraire. Le début de son nouveau roman, La Remise au monde, lui ressemble assez. Jérôme Avalon, un écrivain qui n'écrit plus, tente sans succès de se suicider sur une plage de Malibu. Il est recueilli par un peintre en bâtiment, Brush, qui vit dans une roulotte. En fait, Brush est une sorte de facteur Cheval qui peint depuis des années des nus féminins sans chercher à exposer. Ses oeuvres séduisent d'emblée Avalon. Les conversations entre l'écrivain désabusé et le peintre heureux de sa solitude sont émouvantes, drôles, dans une atmosphère hors du temps, à l'image du peintre qu'il met en scène.

Jérôme Avalon cependant est vite tiré de sa lassitude, un peu trop vite même, et se mue en un véritable homme d'affaires. Il parvient ainsi à convaincre Brush de vendre ses tableaux à un célèbre marchand d'art, invente un cocktail vendu cent dollars le verre dans un restaurant chic de Los Angeles et retrouve une actrice belle, riche et amoureuse de lui. Le roman se transforme alors en comédie charmante où les riches sont généreux, les femmes toujours jolies et accessibles. La scène où Brush fait échouer son exposition, choqué que sa peinture ne soit plus qu'une affaire de cote comme un vulgaire titre boursier, est plus gentille que vraiment satirique. Les bons sentiments triomphent et l'art ne succombera pas au marché. Tout avait si bien commencé - c'est-à-dire mal - qu'on se demande comment l'auteur en arrive là. A moins que Michel Rio n'ait cherché à parodier ces romans qui plaisent tant au public ? Si on s'en tient à la quatrième de couverture, qui cite une scène torride peu représentative du livre, on pourrait le craindre. Parodie ou sincérité ? On reste dubitatif et un lecteur plus caustique que ne semble l'être Rio se prendrait vite à regretter qu'Avalon n'ait pas fait une nouvelle tentative de suicide, réussie cette fois...


Ariane Charton
( Mis en ligne le 31/01/2002 )
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