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Littérature -> Romans & Nouvelles |
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Le meilleur des mondes ?... | | | Paul Melki Au paradis de Candide Calmann-Lévy 2008 / 14 € - 91.7 ffr. / 224 pages ISBN : 978-2702139219
Date de parution : 27/08/2008. Imprimer
Et si Voltaire avait écrit une suite des aventures de Candide ? Un vieux manuscrit niché dans le tiroir dun bureau de lAcadémie Française qui aurait été le sien, le prouverait ? Ces feuillets, dont lexistence serait devenue une légende orale qui, au fil des décennies, se serait colportée de bouches à oreilles pour tomber malgré tout dans une béante indifférence, sont retrouvés par un employé de ménage curieux.
Le jeune romancier Paul Melki samuse à imaginer quun tel joyau historique soit dans le domaine des possibles. Voilà donc le valeureux Candide, héros du conte philosophique, ressuscité dans une époque qui nest pas la sienne et qui a tout pour le surprendre et déstabiliser ses convictions altruistes: le 21ème siècle.
Pont de Bagnolet, sur les bords dun périphérique surchargé de carrosses bizarres (où sont passés les vaillants chevaux pour les guider ?!), envahi dune atmosphère puante, tel est lenvironnement décapant qui accueille ce héros du 18ème siècle. Entouré dhommes et de femmes habillés en guenilles et vivant dans de curieuses chambres minuscules faites de cartons, il se demande dans quelle contrée il peut bien se trouver. Au cur de sa réflexion, ses oreilles sont assaillies par la sirène hurlante dun camion du SAMU social, il est au comble de leffroi tant les curiosités qui surgissent devant ses yeux, se butent à son incompréhension la plus étourdissante. Dans des circonstances inattendues, Candide, dans ce Paris travesti, modernisé par un progrès intriguant, incompréhensible, lamoureux transit de la belle Cunégonde, va croiser son maître Pangloss, Martin le pessimiste, Cacambo et bien évident le visage de sa douce.
Dans une langue aux contrastes délicieux, Paul Melki prend un profond plaisir à confronter un témoin imaginaire dun 18ème siècle des Lumières aux trépidations modernes dun 21ème siècle dans lequel vitesse, temps, codes socio-culturels, architecture et aménagement du territoire sont marqués par une démographie galopante et des mouvements migratoires massifs. Candide, éberlué, use de son langage châtié quand, médusés, ses interlocuteurs lui répondent en verlan ou sans ménagement.
Lauteur, à travers les pérégrinations de ce jeune homme au cur et au jugement bons et innocents, offre un regard panoramique sur notre société et plus globalement sur les relations entre individus. Candide, toujours obnubilé par son «tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes», sobstine à vivre les situations avec une authenticité presque naïve et ce malgré une cruauté humaine semblable finalement à celle de son époque. Seules les formes changent et non les intentions. Cest donc un constat à la fois cynique et tendre que lécrivain expose, par lil acerbe de Candide, sur le fonctionnement social de la France ; ses réflexions, ses remarques et ses conclusions sont parfois très drôles. Certains passages restent énigmatiques, laissant le lecteur dans un labyrinthe obscur. Le sens des évènements est alors aléatoire ; peut-être est-ce une volonté de lauteur que de troubler limagination des lecteurs ?...
Frédéric Bargeon ( Mis en ligne le 27/08/2008 ) Imprimer | | |
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