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Carnets posthumes : 1942-1994
Elias Canetti   Le Livre contre la mort
Albin Michel - Les Grandes Traductions 2018 /  25 € - 163.75 ffr. / 488 pages
ISBN : 978-2-226-32086-5
FORMAT : 13,5 cm × 20,0 cm

Peter von Matt (Postfacier)

Bernard Kreiss (Traducteur)

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."Pensées contre la mort. La seule possibilité : elles doivent rester des fragments. Il ne faut pas que tu les publies toi-même. Il ne faut pas que tu les organises. Il ne faut pas que tu les unifies" (Canetti, 1988).


Elias Canetti (1905-1994) est connu pour trois faits littéraires d'importance: Auto-da-fé, son unique roman publié en 1935, Masse et puissance, essai anthropologique publié en 1960, et le prix Nobel de littérature obtenu en 1981. Reste une œuvre autobiographique volumineuse dont font partie en quelque sorte ces carnets posthumes : Le Livre contre la mort.

Il faut rendre hommage à Albin Michel de publier Canetti en 2018. L'auteur est en effet assez peu lu, et son œuvre, en dépit d'un prix Nobel, est peu connue du lecteur français. Le Livre contre la mort est avant tout un livre sur la mort, thème bien terne à une époque qui tend à le nier !

Canetti explique dans ses notes qu'il a toujours voulu bâtir une œuvre unique sur la mort. Il la redoutait, la craignait, l'exécrait, ne la comprenait pas, et il ne put établir un essai définitif à son sujet. Il accumula des notes durant cinquante ans, dont la plupart était restée inédite en français. Réflexions philosophiques à la brutale actualité, et fragments autobiographiques composent ce vaste volume. L'auteur de langue allemande y est à la fois trivial et profond, insaisissable et fulgurant, tragique et pathétique. On aurait tendance à penser que la mort est quelque chose qu'un écrivain appréhenderait avec davantage de sérénité. Ici pas du tout. L'écrivain la refuse catégoriquement, sans la moindre concession et avec une frayeur qui dura un demi siècle. Cette guerre perdue d'avance, illusoire et inepte, aura pour fruit cet objet littéraire.

Et des aphorismes définitifs qui placent Canetti auprès des Cioran et Leopardi, même si sa démarche est plus pragmatique. Sur ces milliers de notes très éparses, retenons par exemple :

"Toujours sentir la présence de la mort sans partager aucune des religions consolatrices, quelle aventure, quelle effroyable aventure" (...)
"Un peuple d'hommes-kangourous qui se baladent partout avec leurs morts tout racornis serrés dans la poche ventrale" (...)
"On ne meurt pas de chagrin, de chagrin on continue de vivre" (...)
"Il mourut pour accomplir les dernières volontés de son argent" (...)
"Je ne veux plus enterrer personne. Plutôt être enterré moi-même"

Avec les années, Canetti se résigne de plus en plus à l'idée de mourir, victime des disparitions nombreuses et effroyables qu'il a surmontées (sa mère, sa femme, des confrères écrivains). Deux ans avant sa mort, il se promène dans un cimetière de Zurich pour y choisir sa dernière demeure. Puis il décède en 1994, finalement vaincu par la mort... et sans avoir ordonné ses réflexions sur celle-ci. Ce grand livre contre la mort n'aura donc pas abouti... à cause de la vie, à cause de la mort. Un grand livre sur la mort est-il tout simplement possible à réaliser ici-bas ? N'est-ce pas un échec en soi ? Le livre n'est alors que la trace d'une souffrance métaphysique insoluble.

Ces carnets posthumes, sans atteindre la puissance évocatrice d'un Cioran, embrassent le scandale de la création humaine. Sans religion, mystique et paradis, la mort est l'arrêt brutal du tout vivant, sensible et merveilleux. Canetti, obsédé par cette fin absurde, a tenté de décrire cet état durant une vie d'écrivain, marquant (et déprimant ?) son lecteur... pour l'éternité.


Jean-Laurent Glémin
( Mis en ligne le 13/04/2018 )
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