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Littérature  ->  Essais littéraires & histoire de la littérature  
 

Voyage littéraire
Jean Clair   Dialogue avec les morts
Gallimard - Blanche 2011 /  18.9 € - 123.8 ffr. / 285 pages
ISBN : 978-2-07-013210-2
FORMAT : 14cm x 20,5cm
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Jean Clair (né en 1940) est écrivain, critique d’art, conservateur du patrimoine et membre de l’Académie Française. S’il reste encore très actif en tant que commissaire d’expositions, il publie régulièrement des essais critiques sur l’art, la littérature et notre époque dans ce qu’elle a, notamment, de post-historique. L’Hiver de la culture, paru cette année, dénonce avec autorité et lucidité la médiocrité et la surestimation de l’art contemporain.

L’essayiste propose avec Dialogue avec les morts une sorte de suite logique, bien que non chronologique, aux Carnets publiés précédemment chez Gallimard : Journal atrabilaire (2006), Lait noir de l'aube (2007), La Tourterelle et le chat-huant (2009). Que ce soit sous forme de souvenirs personnels, de petites chroniques, voire de fragments, Clair continue sa quête littéraire dans un style d’une clarté qui d’emblée enchante le lecteur. Car l’homme est autant écrivain passionnant que fin styliste. Rigueur intellectuelle, confession émouvante ou encore observation chirurgicale sont les qualités que l’on peut aisément prêter à Clair tant ses écrits grandissent intellectuellement le lecteur. Ils sont peu dans la prose contemporaine à proposer une vision si «claire», emprunte d’une telle connaissance de l’art. Loin des critiques faciles qui la taxent de réactionnaire, l’œuvre de Jean Clair mérite notre plus grande attention.

Clair le précise, il est incapable d’écrire de roman et se contente d’une forme qui serait en phase avec une réalité plus directe : «Je n’ai jamais réussi à écrire un roman. L’idée même de m’aventurer à la faire me répugne. Je suis incapable d’imaginer, d’inventer, de créer des personnages, des situations, des dialogues, un récit, une progression, une fin. Tout cela m’apparaît comme une fâcheuse menterie» (p.95). A partir de ce constat, son œuvre se traduit par quelques confessions, quelques voyages, quelques analyses critiques sur l’art ou ses contemporains. Ce livre, dont le plan de travail répond aux obsessions de l’auteur (La Guerre, L’art contemporain, la mythologie, l’écriture, le rêve, les souvenirs d’enfance, les animaux, etc.), est un voyage spirituel et moral, éducatif et culturel, critique et polémique. Avec Clair, on est à la fois dans la contemplation exemplaire et l’amère lucidité, les plaisirs simples de l’existence et la colère de l’artiste.

De l’observation des SDF de son quartier en passant par la mythologie animale, pour finir (comme il a commencé) par une touchante confession sur son enfance, Clair compose un recueil hybride mais cohérent. Il brosse en quelques pages bien trouvées tout ce qui concerne le travail de l’artiste sur notre époque moderne. De coups de cœur en coups de gueule pour parler simplement, Clair, d’une plume alerte et jamais figée, s’indigne sur l’hypocrisie et la grossièreté d’une époque satisfaite par sa médiocrité. Un simple exemple, celui de la page 175, donne le ton et montre à quel point un homme cultivé et sensible comme Jean Clair peut être écœuré par un système qui met l’infantilisme (compassionnel et démagogique) au cœur de la cité : «On a changé le nom de la crèche Émile Zola de Carpentras. Pour éviter que le «misérabilisme» de l’auteur des Rougon-Macquart ne démoralise le personnel, on l’appellera désormais «Les Petits Berlingots». Mieux vaut une enfance nourrie de bonbons multicolores qu’une enfance hâve et grise à la Émile Zola. De la République en statue de sucre. Il conviendrait aussi de débaptiser mon ancien lycée, Jacques-Decour : c’est par trop démoralisant d’appartenir à un établissement qui porte le nom d’un fusillé» (sauf que la Résistance fait encore partie des références des décideurs qui y piochent leurs valeurs morales…). Exemple apparemment trivial mais dont la symbolique en dit long sur la volonté d’épuration festive et sociale… Clair, conscient que l’homme de pouvoir, postmoderne et illettré, s’attache à faire table rase du passé, propose dans ses textes de revenir précisément à ce qui fait (ou devrait faire) notre présent. Loin des vieilleries passéistes ou réactionnaires, Clair revient à l’essentiel de notre condition misérable et éphémère en méprisant justement les tentatives progressistes et démagogiques actuelles. Le sens du détail vrai, de la rectitude morale et d’une vision artistique rigoureuse restent le leitmotiv de l’écrivain.

Jean Clair, en revenant aisément sur des passages importants de son enfance, nous livre ici une prose toute en délicatesse et en subtilité. Un livre qui enrichit et propose une véritable réflexion sur notre époque (décadente ?) qu’elle soit artistique, sociale ou morale.


Jean-Laurent Glémin
( Mis en ligne le 06/06/2011 )
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