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Littérature -> Poésie & théâtre |
| Kurt Drawert La Dernière Image Seghers 2003 / 18 € - 117.9 ffr. / 210 pages ISBN : 2232122174 FORMAT : 13 x 20 cm
Traduit de lallemand par François Mathieu Imprimer
Comment les mots peuvent-ils retranscrire la réalité des choses sans trahir ni forme ni contour ? Comment peuvent-ils rendre latmosphère dun quotidien tout en exhalant lessence des jours qui se succèdent ? En lisant cet ouvrage, les réponses apparaîtront peut-être ; du moins les questions seront-elles mieux posées, plus prégnantes.
Cest ce saisissement de la durée et de linstant, dans les moindres détails souvent, qui permet à Kurt Drawert de faire défiler par ses mots des images à la fois autres et familières. Sa poésie fait appel au réalisme le plus abstrait qui soit : celui de linterpellation du monde. Ce qui nous lève, nous meut, nous transporte même ; ce qui nous blesse, nous émeut, nous bouleverse cela, lauteur linterroge, et il avance ainsi (avec nous) vers un horizon un peu plus lumineux, un peu moins tremblotant.
Né en 1956 non loin de Berlin-Est, étant passé (comme nombre de ses compatriotes) à lOuest, Kurt Drawert fait partie de cette génération daprès-guerre qui a pu se sentir hémiplégique jusquà la chute du mur et pour laquelle les repères sociaux se sont heurtés à deux idéologies diamétralement opposées. Cette déchirure historique apparaît dans lécriture même de lauteur qui témoigne autant des glissements et des cassures du monde que de ses richesses intrinsèques et de son immanente beauté.
«Incompréhensibles et claires,
les choses gisent, enfouies
dans leur histoire.»
Cest par-là que Kurt Drawert nous entraîne : au fond des choses, sous la peau flasque des apparences. Il nous fait percevoir la dualité de ce qui est, la mouvance de ce qui devient. Ainsi sommes-nous confrontés au mur, non celui qui sépare : celui qui réfléchit. Miroir, telle est la fonction du livre véritable. Miroir fidèle ou déformant, grimaçant ou placide. Et La Dernière Image est le reflet ondoyant de ce qui nous entoure. Elle configure, par sa haute définition, une pensée humaine dont les préceptes saccordent avec la tolérance, la connaissance du double et de lunique, du moi et de laltérité.
«Rêve, reviens,
quand il fera nuit et quil sera temps
que la mandragore crie.
Je ne te déshabillerai pas,
mais je te prendrai,
telle que tu es : impitoyablement nue.»
La vérité, nest-ce pas cette mandragore, objet de tous les fantasmes, incarnation des désirs qui sillonnent le passé et lavenir de lHomme ? Quant au présent, il nous est offert ici avec ses fastes et ses tourments. Image récurrente de notre condition humaine.
Daniel Leduc ( Mis en ligne le 23/02/2004 ) Imprimer | | |
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