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Un Américain à Madrid
Ben Lerner   Au départ d'Atocha
L'Olivier 2014 /  21 € - 137.55 ffr. / 205 pages
ISBN : 978-2-8236-0059-9
FORMAT : 14,0 cm × 20,5 cm

Jakuta Alikavazovic (Traducteur)
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Adam Gordon, jeune poète américain du Kansas, est en résidence d’écriture, grâce à une bourse, à Madrid, au prétexte d’écrire un long poème sur la réaction des écrivains espagnols à la guerre civile (1936-1939). Tel est le thème du premier roman de Ben Lerner, poète américain, dont le titre Au départ d’Atocha, est emprunté à John Ashberry, lui aussi poète important et controversé aux USA, un modèle pour le narrateur. Mais Adam écrit très peu : il se promène en ville, voyage à Grenade, Tolède et Barcelone, fume des joints, avale beaucoup de pilules blanches et jaunes contre l’anxiété : «Leur prise rituelle m’était devenue importante (…) parce qu’elles me rappelaient chaque jour que j’étais officiellement cinglé, sous traitement et que mon mal portait un nom» (p.115). Il a besoin des drogues car elles détruisent ou intensifient ses expériences, poète pris entre réel et virtuel.

L’humeur d’Adam est très changeante, il traverse la vie sans but précis, repoussant toujours son prétendu projet, prisonnier d'un sentiment d’imposture ; se prenant au jeu de l’esbroufe, toute son existence finit par se confondre avec un simulacre. Lui qui n’a qu’un but, réussir à donner le change à ses connaissances et dissimuler son absence d’ambition, apprend l’espagnol sans entrain et fait semblant de s’intéresser aux autres : «Plus j’étais conscient du ridicule de mon ambition, plus elle me consumait. Ma foi dans la poésie n’avait pas été restaurée, mais je ne croyais soudain plus du tout à l’univers des possibles» (p.117). Il pense que la poésie peut être un espace pour l’imaginaire mais il le réduit parfois à un médium mort ; Ashberry le poète offre un miroir idéal à son angoisse.

Adam Gordon se promet de ne jamais écrire de roman car ce genre littéraire réduit le côté chaotique de la vie dans une narration géométrique. Il s’intéresse plus aux questions qu’aux réponses. Il tord la réalité et la transforme en fiction ; il élimine la frontière entre réel et irréel. On peut même dire qu’il ne voit pas la différence entre la vie et l’art. Le monde est plein de possibilités mais il ne vit pas bien ses relations, ne sait pas s’il préfère Isabel ou Teresa ; il ment sur ses parents, s’invente une vie, un personnage pour attirer la pitié et la sympathie, il ferait n’importe quoi pour se rendre intéressant, mais avec la peur d’être démasqué.

Il aime les images : il va au musée du Prado et admire toujours le même tableau : «Tête baissée, je filais en salle 58 m’installer devant la Descente de croix de Rogier Van der Weyden. Souvent je n’étais debout que depuis trois quarts d’heure»(p.10). Adam se demande quelle est la signification de l’image en fonction du texte. Dans le roman, il y a cinq photos toutes en relation avec un texte précis.

La dimension politique est importante car la réalité rattrape le narrateur avec les trois attentats à la gare principale de Madrid, Atocha, le 11 mars 2004. Le roman est situé dans l’Amérique de Bush et le narcissisme d’Adam est stoppé par la violence historique. C’est une façon de penser pour un Américain expatrié qui subit les conséquences de la politique étrangère des USA. Il ne peut échapper à la guerre mondiale contre la terreur.

En lisant Au départ d’Atocha, nous pensons à Italo Svevo et son alter ego Zéno, jeune homme sans volonté, impuissant à agir car il s’analyse trop, comme Adam. Il y a dans ce roman plusieurs modes d’écriture : description factuelle et récit intériorisé et soudain un «chat» - la dialogue électronique - au milieu du livre, qui raconte une histoire dramatique arrivée à un ami d’Adam, Cyrus ; la technologie moderne fait que le mode d’écriture du «chat» est direct, seul moment qui transcende ces couches de narration.

Un roman d’apprentissage américain contemporain où est évoqué le statut du poète et celui de l’étranger loin de son pays. La poésie a un rôle central dans la culture, et toutes les formes du langage influencent les formes de la vie.


Eliane Mazerm
( Mis en ligne le 26/03/2014 )
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