| Stuart Nadler Un été à Bluepoint Albin Michel - Les Grandes Traductions 2015 / 22.90 € - 150 ffr. / 422 pages ISBN : 978-2-226-31457-4 FORMAT : 14,3 cm × 20,5 cm
Bernard Cohen (Traducteur) Imprimer
Dès le début du livre, on est saisi par le style pointilleux, précis et souple de ce jeune écrivain, avec son corollaire, cest-à-dire parfois certaines longueurs dans la mise en place datmosphères quil excelle à installer.
Hilly, le fils sans diplômes ni envies, nen finit pas de régler ses comptes avec un père avocat, autoritaire, devenu richissime en se spécialisant dans la défense des victimes de crashs davion. Sa fortune de nouveau riche lui fait acheter une maison à Blue Point, lendroit où il faut être. Le site est magnifique, démesuré, et lensemble est régi par un domestique noir, Lem, maltraité et asservi. Hilly se lie damitié avec lui, rencontre sa nièce, Savannah, dont il tombe amoureux dune façon curieuse. Une ou deux rencontres, la découverte dune pauvreté extrême, une rebuffade dune Savannah orgueilleuse, le tout sur quelques jours, suffiront à alimenter un rêve qui le poursuivra sa vie durant. Nous sommes dans les années 50 et le racisme encore bien installé sert de décor et de réflexion sur cette facette de la société américaine.
Puis, Hilly surprend Lem en train de lire des courriers de son père et le dénonce. Lemprisonnement est immédiat et au cours de lincarcération Lem meurt poignardé. Cen est fini de ses amourettes avec sa nièce, il prend ses distances avec son père, refuse ses millions de dollars, devient journaliste, et couvre les problèmes raciaux, toujours hanté par Savannah, malgré sa compagne Jenny. «Si la frontière entre la folie pure et la simple stupidité passe par une forme de lucidité navrée, la conscience de ce que son comportement a dirrationnel, je crois que japprochais dangereusement de cette zone limite : jétais à la fois tourmenté par mon obsession, en proie à une tension extrême qui me rendait un peu effrayant, et néanmoins persuadé que je devrais être là». Il retourne pour son travail sur les lieux où elle habite, replonge dans ses souvenirs et cherche à comprendre l'étrange mort de Lem tout en essayant de se faire pardonner sa dénonciation.
Un roman policier débute alors, avec de nombreux rebondissements pour se terminer par une conclusion surprenante, à tiroirs, à laquelle on sattend dautant moins que, si le style est lent au début, il se précipite et les révélations nous sont assénées en quelques pages, comme sil était temps pour Stuart Nadler de terminer son livre. Qui nen reste pas moins un roman très agréable à lire, pour de nombreuses raisons et notamment pour une peinture de lAmérique et de son rapport à largent, efficace dans son analyse lapidaire.
Dany Venayre ( Mis en ligne le 20/02/2015 ) Imprimer | | |