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Comment l’esprit vient aux garçons
Alain Fleischer   L'Amant en culottes courtes
Seuil - Points 2007 /  8.50 € - 55.68 ffr. / 653 pages
ISBN : 978-2-7578-0546-6
FORMAT : 11x18 cm

Première publication en septembre 2006 (Seuil - Fiction & Cie).
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Auteur de nombreux romans, mais surtout photographe, artiste, Alain Fleischer nous propose avec L’Amant en culottes courtes, un beau roman présenté comme autobiographique. En 1957, à treize ans, le jeune Alain est envoyé par sa famille, soucieuse de lui donner tous les atouts nécessaires, pour un troisième séjour linguistique en Angleterre. Enfant choyé par sa mère et sa grand mère, aîné d’une jeune sœur qui paraît insignifiante, Alain est encore à l’âge «des culottes courtes» : renaît ainsi toute une époque où la mixité était inconnue, où chaque classe d’âge avait ses codes vestimentaires, culottes courtes pour l’enfant, longues pour l’adolescent ; rite de passage que l’auteur, arc-bouté aux privilèges de l’enfance, retarde le plus longtemps possible, en passant par l’étape intermédiaire d’un pantalon de golf qu’il partage avec Tintin… autre héros fixé à jamais dans la juvénilité. Un matin de juillet, il débarque donc avec ses bagages, et ses inquiétudes, dans la famille qui va l’héberger un long mois.

Toute une partie du livre se tient là, dans cette évocation nostalgique d’une société disparue, plus proche de Proust à bien des égards que de la France de 2006. La ressemblance est d’ailleurs appuyée jusque dans les citations (la première phrase : «Longtemps j’ai porté des culottes courtes - ici s’arrête toute imitation d’une oeuvre inimitable entre toutes… - et longtemps j’ai regretté de n’avoir pu les porter plus longtemps.»), et les longues lettres quotidiennes à la grand-mère. Mais en arrière-plan de cette France heureuse qui entre dans la prospérité des Trente Glorieuses, planent de sombres souvenirs tus ; le père du narrateur est juif hongrois, il pense longtemps être le seul rescapé de sa famille avant que sa sœur, installée à Londres, ne le retrouve. Père colérique, sombre, énigmatique pour le garçonnet. Père que l’enfant revenu d’Angleterre, sinon adulte, du moins mûri, découvrira dans un voyage familial à la rencontre d’une Hongrie disparue. Belle, étrange, excentrique, Lenke, la tante, ne peut recevoir son neveu en raison du «terrible accent hongrois» qu’elle pourrait lui transmettre...

L’univers d’Alain Fleischer est avant tout féminin : les hommes y sont craints (le père du narrateur) ou dominés (Mr Buss, l’époux de sa logeuse) ou un peu ridicules (le bon Hoppy) alors que les figures féminines, minutieusement décrites ou à peine esquissées, éclatent de vitalité, d’intelligence, de charme. Madame Buss qui le reçoit, «reine d’un royaume sans roi» (p.54), Madame Chapman qui lui fait découvrir Londres à la façon d’un explorateur arpentant des univers vastes et inconnus, Suzann et Rosalind, les filles de la maison «princesses pimbêches».

Le monde tourne autour des femmes : regardez-les ! L’autre «leçon» du roman est celle-ci : le regard avide, passionné, toujours en éveil d’Alain. Point n’est besoin de savoir que l’auteur est aussi photographe, cela éclate à chaque page du livre. Voir, regarder les femmes et, entre autres, la délicieuse Barbara, originaire des îles, de 7 ans son aînée, qu’il dévergondera dans une initiation inversée, l’expérience de Barbara en amour s’effaçant rapidement devant l’inventivité de son jeune amant. Un mois passe, dans la chaleur londonienne, les soirées de concert dans les parcs ou les garden parties, dans une société de classes moyennes qui aspirent à la respectabilité. Un mois au cours duquel Alain saute de loisirs enfantins (l’achat de dinky toys ou le modélisme) au lit de Barbara… Affamé de plaisir, fasciné par la découverte érotique, obsédé, frénétique, il observe comme un territoire à explorer chaque pouce de la peau de Barbara, repère le terrain, s’y perd et nous y égare avec délices. Les journées passent, ponctuées de loisirs et de cours, se terminent officiellement sur les parties rituelles de chinese checkers, au cours desquelles se retrouvent et s’affrontent dans une maison qui s’endort Madame Buss et Alain. Entre eux se noue une amitié, un respect mutuel et des signes de reconnaissance : «See you later alligator, in a while crocodile», jeu de mots échangé en signe de leur complicité.

De l’autre Alain, celui de la nuit, celui de Barbara, Madame Buss ne saura rien, et le lecteur tout, à qui le narrateur conte inlassablement ses découvertes. Un joli livre, plein de nostalgie et d’ironie, de tendresse…


Marie-Paule Caire
( Mis en ligne le 17/09/2007 )
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