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Benvenuto ou le triomphe de la fantaisie héroïque
Jean-Philippe Jaworski   Gagner la guerre - Récit du vieux royaume
Les Moutons Electriques - La bibliothèque voltaïque 2009 /  28 € - 183.4 ffr. / 684 pages
ISBN : 978-2-915793-64-2
FORMAT : 17,5cm x 21cm
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Voici un événement, voici un trésor, voici une fête pour l’esprit : un roman de 700 pages écrit en lettres de feu, qui se déguste en quelques soirées fébriles, et dont les personnages, les situations et les décors restent gravés dans le souvenir du lecteur.

Gagner la guerre est une épopée picaresque et immorale. Elle a pour théâtre une République marchande, Ciudalia, qui emprunte bien des traits à la Venise du XVIe siècle et à d’autres cités-États de la Renaissance italienne. Cette République imaginaire voisine et rivalise avec un royaume qui n’est pas sans rappeler l’Empire ottoman de Soliman le Magnifique, et avec des principautés guerrières apparentées aux monarchies du Moyen Age occidental.

Les héros sont des malfrats et des politiciens, des sorciers et des assassins, des larbins et des aristocrates. Le narrateur et principal personnage, Don Benvenuto Gesufal, homme de main attitré du premier magistrat de Ciudalia, le podestat Leonide Ducatore, se trouve au début du récit sur un navire de guerre de la République, à la veille d’un combat contre la puissance maritime adverse. Drôle d’endroit pour un ancien soldat des armées de terre, et qui n’a nullement le pied marin ! C’est le début de péripéties politiques, militaires et nécromantiques qui nous entraînent successivement au milieu de batailles navales, sur la paille humide des cachots, dans des palais pavés de marbre et couverts de fresques, parmi les forêts glacées ou à l’intérieur des cités à colombages, en une course folle ponctuée de coups de théâtre.

Les lecteurs avertis reconnaîtront sans peine les divinités tutélaires qui planent au dessus du monde de Benvenuto : le Tolkien du Seigneur des Anneaux, pour les mages, les elfes et les nains ; le Howard de Conan le Barbare, pour les grands coups d’épée, les combats sanguinolents et les empires bariolés empruntés à l’histoire antique et médiévale ; le Jack Vance du Cycle de Tschaï et d’autres Space Operas, pour le sens du tableau exotique et la présence constante de l’humour.

Mais ces sources d’inspiration sont assez lointaines et assez maîtrisées pour qu’aucun effet de disparate ne se fasse sentir. Les héros de Jaworski ont leur vie et leur langage propre. Leur vocabulaire navigue entre la verve des truands d’Audiard et la grandiloquence des bretteurs du drame romantique. L’écriture de l’auteur est infiniment plus riche et plus drue que celle de Tolkien, plus précise que celle de Howard et de la plupart de ses héritiers de la Fantasy anglo-saxonne. Son humour est plus âcre que celui, distancié, d’un Vance, plus débridé que celui, fort discret, de Tolkien. Si le décor doit beaucoup à l’Italie renaissante, les héros de Gagner la guerre sont des Italiens de mauvaises humeur, c’est-à-dire des Français, suivant la formule célèbre de Cocteau. Dans ce «récit du vieux royaume», les elfes parlent en vers libres, les spadassins ronchonnent, les sicaires discutent d’art et de littérature, et tout le monde patauge dans la merde et dans le sang, mais le vent, la lumière, les couleurs qui frappent l’œil ou le visage du héros sont immédiatement sensibles. Paysages et caractères sont souvent monstrueux, et parfois aussi d’une vérité et d’une beauté saisissantes. Enfin, pour que rien ne manque à notre jouissance, Gagner la Guerre, grand livre de cape et d’épée, est également une méditation sur la violence et le plaisir qu’elle suscite, et sur le pouvoir, ce plaisir suprême qui dépasse, englobe et dévore tous les autres.

On peut ainsi dire que les modèles anglo-saxons de l’Heroic Fantasy ont été incorporés, dépassés et recomposés en une synthèse nouvelle. Après avoir lu l’épopée de Benvenuto, on ne peut plus dire que la fantaisie héroïque – l’expression peut bien être francisée désormais – soit un genre mineur, comme on l’a longtemps pensé du policier ou de la science-fiction. Il y a plus à tirer d’un chapitre de Gagner la guerre que de cent volumes d’amours germanopratines.

Voici un événement, voici un trésor, voici une fête pour l’esprit : voici, tout simplement, un grand roman français.


Thierry Sarmant
( Mis en ligne le 16/10/2009 )
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