| Domenico Starnone Les Liens
Fayard 2019 / 18 € - 117.9 ffr. / 180 pages
ISBN : 978-2-213-70567-5
FORMAT : 13,5 cm × 21,5 cm
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Voici un court roman en trois parties distinctes, évoquant la vie d’une famille napolitaine. Les parents se séparent dans les années 70, suite à l’infidélité du mari, et ce dernier part vivre à Rome avec Lidia qui est bien plus jeune que lui. Quatre ans plus tard, il réintègre le foyer avec la bénédiction de son épouse Vanda, mais en réalité elle ne pardonnera jamais cet écart à Aldo, gardant toute sa rancœur au fond d’elle. «Tu veux que je te dise ? Tu n’as tout simplement pas pris la mesure de ce que tu m’as infligé. Alors, sache que ce ne serait pas pire, si tu avais introduit ta main au fond de ma gorge et tiré, tiré jusqu’à arracher ce qui bat dans ma poitrine».
La première partie est constituée de lettres de Vanda, non envoyées à son mari, pendant la séparation, lettres amères, désabusées, ironiques et désespérées. Elle s’humilie en lui demandant de revenir, elle l’abreuve de reproches pour l’avoir trompée et abandonnée, la laissant avec sa souffrance. Passés les quatre ans, Aldo veut voir les enfants et réintégrer son logis napolitain. Le couple se reforme, mais reste un peu bancal, chacun est confit d’arrières pensées.
Le livre second opère un saut temporel d’un demi-siècle. Aldo et Vanda partent à la mer, les enfants sont adultes. A leur retour, leur appartement est saccagé et le chat a disparu. La nuit, en essayant de ranger, pour récupérer des photos de Lidia nue, Aldo retrouve les lettres de Vanda. Il fait son introspection et a conscience que ses années les plus heureuses furent celles avec Lidia. Marié trop tôt à 22 ans, il n’a pas eu de jeunesse, avec des choix trop rapides et conformistes.
La dernière partie est la plus amusante et la plus critique car Anna, la fille, expose le point de vue des enfants, elle et son frère Sandro, qui ont bien compris que le père n’est pas le seul coupable. En lui refusant son pardon malgré son retour, Vanda a condamné son couple et la famille. Elle le paiera cher.
Les Liens offre un récit percutant et bouleversant sur les rapports familiaux, si fragiles à nouer et la difficulté de s’en libérer. L’auteur expose avec un grand talent toute une gamme de sentiments négatifs : l’ironie, l’amertume, le sarcasme... Le nom du chat chéri par Vanda est Labes (diminutif de la bestia) ; Anna découvre dans un dictionnaire qu’en latin, Labes signifie ''effondrement''. Chacun a sa responsabilité dans ce naufrage, dans le contexte italien des années 70 : le divorce est très mal vu et presque impossible, et les femmes restent à la maison. «Laisse tomber les lacets, tout ce que nos parents ont su nouer, c’est un lien avec lequel ils se sont torturés toute leur vie», constate Anna.
Domenico Starnone, né en 1946 près de Naples, est soupçonné de se cacher derrière le pseudonyme d’Elena Ferrante (un duo à quatre mains, avec son épouse Anita Raja). Il a obtenu le prix Strega, l’équivalent italien du Goncourt, pour son roman Via Gemito.
Eliane Mazerm
( Mis en ligne le 23/08/2019 )
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