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Science, fiction, contruction
Véronique Willemin   Maisons mobiles
Alternatives - Anarchitecture 2004 /  39 € - 255.45 ffr. / 191 pages
ISBN : 2-86227-424-0
FORMAT : 23x25 cm

L'auteur du compte rendu : Marie-Laure Portal est docteur ès Lettres en Histoire de l’art et Archéologie(Paris IV). Sa formation l’a amenée à s’intéresser à l’architecture. Elle est également chercheuse associée au Centre d’Archéologie Générale où son travail porte sur une modélisation anhistorique de la question du logement.
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Spécialisée dans les architectures marginales, la collection «Anarchitecture» des éditions Alternatives vient de sortir deux ouvrages consacrés, l’un aux Habitats nomades par Denis Couchaux, l’autre aux Maisons mobiles par Véronique Willemin. L’unité de la collection apparaît dans les attrayantes maquettes colorées et très illustrées qui séduisent le lecteur et l’incitent au feuilletage de ces livres.

Diplômée en architecture, investie dans des missions de technologie et développement et membre d’un groupe de recherches sur l’innovation technologique, V. Willemin évoque des architectures mobiles réalisées, projetées ou seulement fictives, dans un ouvrage qui hésite entre deux modes de présentation, l’un chronologique, l’autre typologique. Elle ne choisit finalement pas entre les deux, de sorte que ces deux approches se succèdent dans le livre : les cinq premiers chapitres sont organisés temporellement de 1926 à nos jours (1926-1939, période de la Seconde Guerre mondiale en France et en Amérique, années 1950-1960, années 1970 à nos jours), tandis que les six derniers approfondissent certains types de maisons mobiles (maisons-véhicules, architecture textile, habitations gonflables, volantes, maisons et villes flottantes, logements marins). En l’absence d’explicitation du parti pris, la pertinence de la double présentation retenue peut donc paraître discutable dans la mesure où la partie chronologique présente des éléments qui auraient tout aussi bien pu être exposés dans les chapitres typologiques, tandis que la chronologie n’est pas absente des chapitres typologiques puisque le gonflable tout comme les maisons et villes flottantes couvrent la période 1960-2004 et le chapitre «habiter la mer de Jacques Rougerie» se penche sur les années 1970-2005.

Dans sa partie chronologique, l’auteur débute son exposé par le salon des Arts ménagers qui accueillit, dès l’année de sa création par Jules-Louis Breton (1926), des prototypes innovateurs dans le domaine de la construction, comme une maison préfabriquée en acier de l’architecte Henri Sauvage, démontée et remontée en trois jours à Auteuil après le salon. À l’initiative du directeur de la revue L’Architecture aujourd’hui, se tient en 1934 la première exposition de l’Habitation dans laquelle se développe l’idée de pouvoir déplacer sa maison. L’arrivée des congés payés en 1936 promeut les loisirs et provoque avec eux l’explosion du camping et du caravaning. Au lendemain de la défaite de 1940, le Service des constructions provisoires est créé en France en vue de construire rapidement des baraques et des maisons temporaires pour abriter les sinistrés ; ces contraintes conjoncturelles conditionnèrent cette architecture qui se devait d’être reproductible rapidement en grand nombre et économique tant financièrement que techniquement, utilisant par exemple le bois et non l’acier nécessaire à l’effort de guerre.

En Amérique, à la même époque, la construction d’urgence démarra pour fournir des logements (roulottes, trailers, chalets), d’une part aux quatre millions de travailleurs qui allaient construire des armements (à Detroit, San Francisco, Baltimore, Seattle et San Diego), d’autre part aux onze millions de soldats appelés sous les drapeaux et installés dans des camps d’instruction ; la situation critique amena le président Roosevelt à créer en 1942 une Commission nationale de l’habitation (National Housing Agency) qui remplaça tous les autres organismes gouvernementaux chargés de l’habitat. Dans la décennie suivante, la thèse de Yona Friedman, L’Architecture mobile, publiée en allemand en 1958, constitue un texte fondamental pour la nouvelle architecture. Cet architecte participe au Groupe d’Études d’Architecture Mobile (GEAM) qui présente une exposition itinérante en 1961-1962, montrant ses ambitions d’élaborer une architecture mieux adaptée aux croissances ou décroissances de population et à la circulation intense. Dans les années 1960, autour notamment du groupe Archigram (fondé en 1963 par six architectes anglais), se développe l’idée d’une autogestion, par les usagers eux-mêmes, de la vie quotidienne et donc des espaces construits en sorte que l’architecture offre à ses habitants des services modulables et temporaires adaptés aux usages. Les années 1970-1980 ont vu se développer les projets utilisant des matériaux recyclables comme la cité en carton de Guy Rottier, à brûler après usage (1968-1969) ou la Paper log house de Shigeru Ban, en papier recyclé, proposée pour fournir des logements provisoires aux victimes du séisme de Kobé en 1995, ou bien la fibre de verre du MDU (mobile dwelling unit : unité d’habitation mobile) de l’agence LOT/ EK en 2000.

Les chapitres typologiques commencent par les maisons-véhicules qui regroupent les maisons-roulottes, maisons-camions, maisons-voitures maisons-camionnettes, camping-car, maisons-traîneaux. Vient ensuite une présentation de l’architecture textile, remise en valeur au travers de l’étude du groupe Aérolande, publiée dans la revue Techniques et Architecture de mai-juin 1975. L’auteur traite des tentes, des vêtements refuges de Lucy Orta (architectures se transformant en habits de protection, tentes et bivouacs), et de la yourte contemporaine. Les volumes gonflables occupent le chapitre suivant, avec l’architecture pneumatique du groupe Aérolande (1967) ou les structures gonflables du groupe Utopie (1968). Les maisons-volantes constituent de vieux rêves publiés dans la presse par des dessinateurs visionnaires et poursuivis tout au long du XXe siècle comme dans le projet Instant City du groupe Archigram (1968), qui consistait en une ville itinérante composée d’une série de tentes suspendues à des ballons restant en place le temps de manifestations, expositions et programmes éducatifs, avant de changer d’endroit. Les villes flottantes résolvent le problème de manque de place des villes portuaires comme Monaco, de mauvais sols (marécages) et parfois les questions sismiques comme le projet de ville flottante pour la baie de Tokyo par Paul Maymont (1960). V. Willemin termine sa présentation par les maisons sous-marines et les vaisseaux futuristes de l’architecte Jacques Rougerie qui vise, depuis sa première réalisation, Galathée (1977), à permettre à l’homme de s’intégrer au milieu marin.

L’ingéniosité déployée par les architectes dans le domaine exploré apparaît nettement avec la multiplicité des cas traités par V. Willemin, servie par des plans et illustrations fort utiles à la compréhension de l’agencement des habitations. Un élément qui pourrait gêner le lecteur ressort du travail de l’architecte Y. Friedman dont les explications terminologiques font apparaître l’ambiguïté du concept de «mobilité», mêlant la question de la détermination de l’habitation par l’habitant (forme, orientation, style, etc.) et une notion de déplacement possible de ces habitations pour modifier son voisinage. Plus généralement le titre du livre de V. Willemin recouvre, sous le terme de mobilité, deux notions distinctes, celle du déplaçable et celle du provisoire (destructible ou rapidement escamotable), d’où la réunion relativement artificielle de travaux architecturaux visant à des objectifs très variés et partant de démarches hétérogènes.


Marie-Laure Portal
( Mis en ligne le 10/12/2004 )
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