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''Saisir la nuit de Paris'' | | | Sylvie Aubenas Quentin Bajac Brassaï - Le flâneur nocturne
Gallimard 2012 / 65 € - 425.75 ffr. / 306 pages
ISBN : 978-2-07-012101-4
FORMAT : 25,0 cm × 30,2 cm
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«C'est pour saisir la nuit de Paris que je suis devenu photographe», a dit Brassaï. Cependant, sa volonté de photographier le Paris nocturne des années trente est aussi une volonté de capturer la réalité de la vie, au fil de ses promenades avec Henry Miller ou Léon-Paul Fargue. C'est aussi rendre un Paris plus étrange et plus insolite, où derrière ce qu'on appelle la réalité se cache des décors troublants, presque fantastiques. On pense évidemment à la seconde vague du pictorialisme quand Alfred Stieglitz, le chef de file de ce mouvement aux États-Unis, fondateur en 1902 de la célèbre revue Camera Work à New York, photographiait la beauté de la nuit, des éclairages nocturnes, cette ville moderne aux contours étranges et froids, typiques de la modernité de l’époque. Brassaï inaugure aussi avec d'autres la photographie du promeneur, du flâneur (Willy Ronis, Robert Doisneau, Izis, René Jacques) pour débusquer cette poésie du quotidien, et ici, celle de la nuit et de la ville.
Brassaï n'est pas son vrai nom ; il s’appelait Gyula Halász. Il débarque à Paris où il rejoint en 1924 son père qui enseigne la littérature à la Sorbonne. En 1920, il se rend à Berlin où il travaille comme journaliste en suivant les cours de l'académie des Beaux-Arts Berlin-Charlottenburg. Il apprend le français, lit les romans de Marcel Proust, s'installe à Montparnasse, le Paris artistique des années 1920, rencontre Henry Miller, Léon-Paul Fargue et Jacques Prévert.
Bien sûr, la nuit, c’est tout un autre monde, un monde secret, celui des noctambules et des rêves, celui familier aux surréalistes, de cette singulière beauté froide et sombre, Paris des êtres mélancoliques ou esseulés (clochards), des travailleurs de nuit aussi, amoureux sur un banc ou dans l’intimité d’une voiture, des endroits désertés ou peuplés (le music hall, le cirque), du métro, des gares, tout ce petit monde qui s’agite la nuit, qui veille, qui rôde et qui mourra à la pointe du jour, trop blafard pour eux.
Brassaï consacra trois ouvrages à ce Paris nocturne : Paris de Nuit (1932), le plus célèbre, Voluptés de Paris (1935) qu'il n'a jamais revendiqué, et Le Paris secret des années 30 (1976), plus social. Le livre de Sylvie Aubenas et Quentin Bajac, somptueusement illustré des photos de Brassaï, reprend l'essentiel de ses livres avec même des inédits. Ce ''Paris by night'' n'a rien de la carte postale mais au contraire met en avant le côté obscur, étrangement inquiétant de la ville endormie, silencieuse, la nuit où règne l'ombre étoilée des lampadaires, du bitume mouillé et de ses reflets fantomatiques.
Un beau livre, simple, évident, rare.
Yannick Rolandeau
( Mis en ligne le 19/12/2012 )
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